Le Sénat livre son rapport sur le projet de loi protection de l’accès aux œuvres culturelles à l’ère numérique

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Après avoir auditionné la ministre de la Culture et le président du CSA, la commission culture du Sénat a présenté son rapport sur le texte de loi et a voté ses amendements, notamment sur la transaction pénale. 

Lors de la présentation à la presse du mercredi 5 mai, le président de la commission Laurent Lafon a bien souligné que « ce texte est une déception par rapport au projet ambitieux de la loi Riester dont le processus a été interrompu ». Pour lui, « la version proposée par Roselyne Bachelot est minimaliste, réduite aux points qui ne posent de difficulté à personne », alors que le secteur est confronté à de profondes évolutions, en particulier face à l’émergence des plateformes. Si, pour les sénateurs, le grand renoncement concerne la réforme de la gouvernance et du financement de l’audiovisuel public, ils n’en ont pas moins souhaité enrichir le texte pour répondre aux questions urgentes. 

Transaction pénale 

Tout en restant dans le périmètre du projet actuel – création de l’ARCOM, lutte contre le piratage, contrôle de la cession des catalogues –, les apports du sénat vont permettre de « muscler le texte en ajoutant quatre marqueurs essentiels ». À commencer par l’instauration d’une transaction pénale contre les pirates audiovisuels, ce que la plupart des professionnels réclamaient à la première lecture du texte
Pour le rapporteur Jean-Raymond Hugonet, « sans être dans le tout-répressif, la transaction doit être le point d’orgue de la réponse graduée et doit responsabiliser l’internaute ». Les sénateurs ont ainsi voté un amendement qui dote le nouveau régulateur de moyens de sanction. « Concrètement, lorsque le comportement délictueux répété de l’internaute ne fait plus de doute, le membre de l’ARCOM en charge de la réponse graduée aura la faculté de lui proposer une transaction, d’un montant de 350 euros, soit le tiers de la sanction maximum aujourd’hui encourue, destinée à éteindre l’action publique. Cette transaction doit être homologuée par le Procureur de la République, soit une procédure relativement légère. En cas de refus, le droit actuel trouve à s’appliquer, et l’internaute sera passible de poursuites. » 
Le rapporteur Hugonet estime que « cette mesure, très attendue par les ayants droits, présente d’abord l’avantage de mettre un terme au sentiment d’impunité des internautes pirates. Même si son montant de l’amende est relativement faible, la sanction constitue une ultime étape qui crédibilise l’approche pédagogique. Enfin, elle pourrait soulager les tribunaux, en permettant à l’internaute d’éteindre en amont le travail de la justice ».

Rééquilibrage entre les éditeurs de programme

Les sénateurs souhaitent par ailleurs « un indispensable rééquilibrage entre les éditeurs de programme et les producteurs ». Face à la concurrence des plateformes étrangères et afin d’assurer la diversité culturelle, les chaînes historiques doivent avoir accès aux catalogues qui sont en train d’être rachetés. Pour Jean-Raymond Hugonet, « c’est une affaire d’équité. Aujourd’hui, Salto est une coquille de noix par rapport à des paquebots tels que Netflix. La plateforme française doit racheter des droits à TF1 pour proposer ses contenus à ses abonnés. Canal+ doit racheter des droits de séries qu’elle a financées pour les proposer en Pologne. C’est kafkaïen ! Notre amendement permet l’équité et renvoie à un dialogue interprofessionnel ».

Au sujet de la pérennisation de France 4, les membres de la commission proposent de compléter l’offre en soirée par Culture Box, « pour former un tout cohérent qui réponde à une demande quasi-unanime pendant la pandémie ». Enfin, ils souhaitent des ajustements qui permettent de préserver l’attractivité et la qualité de la TNT pour les populations les plus éloignées des abonnements, ainsi qu’un assouplissement des autorisations d’émettre pour ces chaînes.

Pour rappel, le projet de loi du gouvernement vise à accompagner les internautes dans leurs pratiques numériques vers des usages responsables. Pour cela, il tend notamment à fusionner le CSA et la HADOPI au sein de l’Autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique (ARCOM), à renforcer la protection des diffuseurs contre la reprise non autorisée de leurs programmes et à améliorer la lutte contre le piratage en ligne… tout en protégeant l’accès du public aux œuvres.
Le texte modifié par la commission de la culture, de l’éducation et de la communication du Sénat sera débattu avec la ministre à l’Assemblée nationale le 18 mai.

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