Des cinéastes au Parlement européen pour défendre la territorialité des droits

© Suzy Lagrange

Toujours aussi mobilisés autour du maintien du géoblocage pour les services audiovisuels, les cinéastes ont évoqué, à Strasbourg, les vertus de la territorialité des droits, fondement du financement de la création et, par extension, de la diversité culturelle.

Jean-Pierre et Luc Dardenne, Costa Gavras, Jeanne Herry, Agnieszka Holland, Pierre Jolivet, Cédric Klapisch, Claude Lelouch, Daniele Luchetti, Nathalie Marchak, Radu Mihaileanu, Cristian Mungiu, Olivier Nakache, Jaco Van Dormael et Volker Schlöndorff : qu’ils soient physiquement présents ou qu’ils interviennent à distance, ils étaient nombreux à porter la parole des cinéastes à la conférence de presse du 29 novembre.

Rappelant que c’est en Europe que l’exception culturelle est née, Pierre Jolivet et Costa Gavras ont souligné la contradiction d’une démarche européenne qui y mettrait fin. De fait, la fin du géoblocage provoquerait sur le long terme, selon les évaluations, une perte économique d’environ 3,6 Mds € par an pour les producteurs européens, tandis que les spectateurs perdraient annuellement environ 4,5 Mds € par an. En effet, selon les cinéastes, ce sont les spectateurs qui seraient les premiers à pâtir des conséquences d’une telle mesure, à savoir une augmentation des prix et une baisse de la qualité et de la quantité de l’offre audiovisuelle. 

Confiant combien l’exclusivité territoriale avait été clé pour financer ses films, le Suédois doublement palmé Ruben Östlund a aussi rappelé qu’elle était essentielle pour préserver les différences culturelles et les identités nationales – notamment dans des pays où l’influence et la langue anglo-saxonnes sont prégnantes. La réalisatrice polonaise Agnieszka Holland et l’eurodéputé Emmanuel Maurel se sont par ailleurs inquiétés du fait que les premiers impactés seraient les plus petits pays. 

Si le secteur audiovisuel et cinématographique est unanime sur les dangers de la fin de la territorialité des droits, l’eurodéputé Geoffroy Didier impute la résistance de certains députés européens à l’ère du tout gratuit, à la bulle bruxelloise, parfois oublieuse des spécificités nationales, et enfin à l’idéologie de la libre circulation qui s’appliquerait à tous les domaines, sans exception. 

Alors qu’un rapport d’initiative sur la mise en oeuvre du Règlement géoblocage sera soumis au vote au Parlement européen le 13 décembre prochain, Cédric Klapisch a relevé que ce sont les gestes politiques forts qui permettent des gestes artistiques forts, incitant les députés européens à avoir la volonté politique de continuer à porter la diversité culturelle à travers toute l’Europe.

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