Auditionnée hier devant la commission de la culture et de l’éducation du Sénat, la ministre a confirmé vouloir une gouvernance unique de l’audiovisuel public, et ce dès l’an prochain. Par ailleurs, elle ne veut pas toucher au modèle du CNC ni à la protection du droit d’auteur, mais faire évoluer le pass Culture.
Alors que l’État a annoncé une coupe de plus de 200 millions d’euros pour la culture en 2024, Rachida Dati était, ce 12 mars, entendue pour la première fois au Sénat en tant que ministre de la Culture. Tentant de rassurer sur certains sujets – « sur le spectacle vivant et les territoires, il n y aura pas un euro de moins » –, elle a d’abord annoncé que la réforme de l’audiovisuel public sera examinée rapidement par le Parlement. « Il y aura une première lecture avant l’été. Il faudrait idéalement que nous bouclions d’ici la fin de l’année, pour que le 1er janvier 2025 ce soit opérationnel ». Elle a confirmé vouloir une gouvernance unique, pour « fusionner, pousser à la coopération, aux synergies… », et « sanctuariser le financement par la TVA ».
Financer des navettes pour que le jeune public aille au cinéma
Sur le cinéma, « il n’y a pas de remise en cause de l’engagement du ministère de la Culture. Même si certains veulent remettre en cause le modèle du CNC, je ne veux pas le mettre par terre », a souligné Rachida Dati, interrogée notamment par le sénateur Jérémy Bacchi. Sans indiquer ce qu’elle défendra lors de la prochaine revoyure de la chronologie des médias, « qui assure le financement des films et protège la salle de cinéma pendant les premières semaines d’un film », la ministre considère que « nous avons su préserver un système vertueux, et je suis très fière que nous soyons le seul pays du monde où il y a autant de salles et autant dans la proximité ». Une proximité qu’elle souhaite encourager dans les territoires ruraux, pour la culture en général – « je suis pour la mobilité des œuvres et des spectateurs, comme avec les musées ambulants » –, et pour le cinéma en particulier.
« Je souhaite financer des navettes pour que le jeune public aille au cinéma », a ainsi déclaré la ministre, qui s’est aussi exprimée sur le pass Culture. « Le pass Culture marche très bien, mais on reste dans la reproduction sociale : celui qui l’utilise sait où il va et ce qu’il cherche. » Rachida Dati souhaite « renforcer son éditorialisation », et voudrait « élargir la part collective aux MJC, maisons de quartier et centres sociaux ». Et pour les apprentis et les CFA, « qui ne sont pas éligibles au pass Culture, ça va devenir une réalité ». Plus largement, la locataire de la rue Valois souhaite davantage de collaboration de son ministère avec les acteurs de l’éducation populaire « qui font de la médiation, ce qui est extrêmement important ».
Le combat contre les VHSS doit aller plus loin
Sur les violences sexuelles dans le secteur, et notamment après l’audition de Judith Godrèche au Sénat, le combat « doit aller plus loin » pour la ministre. « La pédocriminalité, ce n’est pas de l’art, et c’est encore plus flagrant dans le cinéma, lieu où s’exerce la domination. » Au-delà du conditionnement des aides du CNC à la formation pour l’ensemble des métiers de la filière, Rachida Dati souhaite qu’il y ait « un protecteur des enfants sur tous les tournages, pour veiller à ce que la dignité du mineur soit respectée ». Quant au maintien de Dominique Boutonnat, accusé d’agression sexuelle, à la présidence du CNC, « entre sa situation lors de sa mise en examen et aujourd’hui, il n’y a pas d’éléments nouveaux : j’attendrai donc l’audience [en juin] », a indiqué l’ancienne magistrate. Le juge n’ayant pas empêché Dominique Boutonnat d’exercer comme il aurait pu le faire : « ce n’est pas à moi de le mettre en retrait ».
Ne pas toucher au droit d’auteur
La ministre de la Culture est aussi revenue sur le Printemps de la ruralité, qui doit contribuer à « l’accès à la culture par tous et partout », et le besoin de soutenir davantage les collectivités locales dans leur besoin d’ingénierie culturelle, notamment via les Drac. Parmi les enjeux d’aujourd’hui, Rachida Dati s’est exprimée sur le pluralisme de l’information, sur les aides à la presse qui doivent être maintenues, et bien sûr sur l’IA générative. « Contrairement à Bercy, je veux préserver le droit d’auteur. » Ce qui relève de l’exception culturelle française ne doit pas être remis en cause selon la ministre de la Culture : « La protection du droit d’auteur, c’est comme le CNC : il ne faut pas y toucher »
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