CineEurope 2025 : Rencontre avec Phil Clapp et Laura Houlgatte, Unic

Laura Houlgatte pour l'ouverture de CineEurope, ce 16 juin 2025 © UNIC

La convention européenne s’est ouverte aujourd’hui à Barcelone, où le président et la directrice générale de l’Union Internationale des Cinémas ont souligné la résilience de la filière et la nécessité de travailler main dans la main avec les distributeurs. À la veille de CineEurope, Phil Clapp et Laura Houlgatte passaient en revue les enjeux clés pour défendre la salle… et les temps forts de l’événement.

Comment abordez-vous ce nouveau rendez-vous barcelonais ?

Phil Clapp : Dans la continuité des efforts que nous avons déployés ces dix dernières années, la nouvelle édition se veut aussi diversifiée, attrayante et représentative que possible du secteur cinématographique européen. Ainsi, nous sommes ravis de mettre en avant non seulement les prochaines sorties des grands studios américains, mais aussi celles de Studiocanal, de Lionsgate et – pour la première fois – d’Angel Studios. Nous profiterons également de cet événement pour saluer les contributions d’acteurs majeurs du marché européen tels que Pathé, Kinopolis Cinemas ou encore Leonine Studios.
Les conférences exploreront notamment le territoire suédois, ainsi que des sujets d’actualité comme l’usage croissant des réseaux sociaux, les défis et opportunités que représente l’intelligence artificielle pour notre secteur, sans oublier l’évolution constante des technologies cinéma.

Depuis longtemps, les productions locales représentent des moteurs essentiels de la fréquentation dans les pays membres de l’Unic. Mais en 2024, les productions nationales semblent avoir du mal à franchir leurs propres frontières. Faut-il y voir un motif d’inquiétude, ou simplement une dynamique naturelle des marchés ?

Laura Houlgatte : Par nature, les productions nationales sont créées en premier lieu pour leurs publics locaux. Certains films se prêtent mieux au “voyage » que d’autres, en fonction des proximités linguistique ou culturelle, comme entre les pays nordiques, ou en fonction de leur genre – l’humour, donc la comédie, restant encore très spécifique à chaque pays. C’est aussi ça la diversité et la beauté des territoires que l’on représente ! Mais il y a aussi des titres qui traversent les frontières, comme les romans de cape et d’épée (Le Comte de Monte-Cristo), les dramedy (Il reste encore demain) ou encore tous les films qui deviennent des remakes. Dans les Balkans, les biopics sur des chanteurs populaires de la région circulent bien au-delà des frontières, comme ça a été le cas en 2024 pour le film serbe Nedelja sur la vie de Dzej Ramadanovski, qui a aussi cartonné en Bosnie-Herzégovine et au Monténégro. 
Finalement, la logique reste la même : on a besoin de films de tous les genres, de qualité, avec un potentiel commercial, pour attirer tous les publics. En 2024, 36 titres européens se sont classés dans les tops 5 respectifs de nos territoires, contre 26 en 2023. 

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Le CinemaCon a mis en lumière cette année la prise de conscience, côté américain, de l’importance d’une programmation diversifiée pour la bonne santé du marché. L’Unic échange-t-il avec ses homologues américains sur ce sujet ?

P.C. : Notre Union entretient effectivement une relation solide avec l’association des exploitants américains Cinema United sur de nombreux sujets, ce qui est naturel dans un secteur aussi mondialisé que le nôtre. Nos échanges portent davantage sur les enjeux politiques, réglementaires et structurels que sur les décisions commerciales prises individuellement par nos membres. Cela dit, nous partageons régulièrement réflexions et informations sur l’évolution du secteur dans son ensemble, notamment sur notre rôle à jouer pour garantir à nos membres l’accès au plus large éventail possible de contenus pensés pour le grand écran.

Où en est le travail de l’Unic auprès du nouveau Parlement européen ? Notamment dans le contexte des remises en question de l’exception culturelle européenne par l’administration Trump ?

L.H. : Cette première année de mandat est en général cruciale d’un point de vue pédagogique. Avec un Parlement renouvelé à plus de 50 %, une orientation politique plus à droite, une Commission qui arrive avec de nouvelles priorités en phase avec la situation géopolitique… (presque) tout est à recommencer. Il s’agit, pour nous, de célébrer la valeur économique, culturelle, sociale et démocratique de la salle, et ce dans toute l’Union européenne ; avec des données, mais aussi en organisant des projections par exemple et, bien entendu, en nous positionnant sur des sujets clés tels que le géoblocage, Europe Créative, la directive SMA ou encore la directive droit d’auteur. Évidemment, nous ne travaillons pas en vase clos : comme le reste de l’industrie, nous devons aussi évoluer au gré des nouvelles et du monde dans lequel nous vivons.

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Phil Clapp, vous êtes également directeur général de l’UKCA, la fédération des cinémas britanniques. Nous avons récemment relayé un rapport de la Chambre des communes, qui souligne notamment l’urgence de soutenir le secteur cinéma au Royaume-Uni [voir Boxoffice Pro du 11 mai 2025]. Où en sont les discussions ?

P.C. : Le rapport – que nous avons accueilli très favorablement – contient un ensemble de recommandations adressées au gouvernement britannique, qui sont actuellement à l’étude. Dans cette attente, nous nous efforçons de fournir les éléments factuels et les données nécessaires pour bien faire comprendre le potentiel de ces mesures en faveur du redressement du secteur.
Certaines des recommandations les plus pertinentes pour nos membres impliquent des dépenses publiques ; il nous faut donc être extrêmement rigoureux dans la démonstration des bénéfices économiques, culturels et sociaux qu’elles pourraient générer.

Laura Houlgatte pour l'ouverture de CineEurope, ce 16 juin 2025 © UNIC

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