Ciné Sens en éveil

Sandrine Dias présente l'audiodescription qu'elle a réalisée pour Jean-Michel le Caribou

L’association, créée en 2013 à Villeurbanne, travaille à l’accessibilité de tous ceux qui ont des déficiences sensorielles.

« Voici les films avec AD, ST-SME et HI* que Ciné Sens a repérés. Ces versions permettent de garantir un accès plus large au cinéma pour toutes et tous » : voilà ce qu’on peut lire, chaque mois, sur le site de l’association qui référence les nouveaux films accessibles, mais répertorie aussi les aides dont peut bénéficier la filière, la liste des prestataires techniques, des associations ou des médias mobilisés sur le sujet. Ciné Sens se veut ainsi une interface permanente entre tous les acteurs concernés, depuis les producteurs de films jusqu’à leurs spectateurs. « À la différence d’associations de bénéficiaires, Ciné Sens est portée par des professionnels du cinéma », souligne Cécile Dumas, sa déléguée générale, qui elle-même a travaillé pendant 14 ans dans les cinémas Pathé de Lyon, tandis que le président, Grégory Faes, qui est aussi directeur de Auvergne-Rhône-Alpes Cinéma, a l’expérience des institutions. 

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Recueillir l’information, chiffrer les données pour pouvoir les transmettre

Si l’action de base est de référencer les informations, la première étape qui bloque est leur recueil en amont, auprès des distributeurs. « Alors qu’ils communiquent beaucoup sur leurs films, certains n’ont pas encore intégré l’importance de signaler systématiquement l’existence de versions AD ou ST-SME, aux programmateurs et responsables de salles. » De l’autre côté, un distributeur ne sait pas toujours à quel cinéma il peut proposer sa version adaptée. Pour Cécile Dumas, « il est donc urgent de recenser et qualifier les équipements. Même si le CNC le fait, l’absence de données chiffrées est flagrante ».

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« Le public ne se déplacera pas au cinéma s’il ne sait pas quelles sont les versions proposées, sur quelles séances et dans quelles conditions. »
Cécile Dumas

Même difficulté enfin pour communiquer auprès du public, « qui réfléchit à deux fois avant de se déplacer au cinéma, s’il ne sait pas quelles sont les versions proposées, sur quelles séances et dans quelles conditions ». Côté salles, tous les systèmes de billetterie n’intègrent pas ces données. Or, la communication numérique est interfacée avec le logiciel de caisse : les versions disponibles, les horaires des séances accessibles remontent sur les sites internet des salles et sur AlloCiné en fonction de ce qui est renseigné via le logiciel séance par séance. « Si un système comme Boost le permet, c’est un point dont il faut se saisir de façon globale au sein la filière », alerte Cécile Dumas.

Partager les pratiques, former à la médiation

Ciné Sens mène aussi un travail de sensibilisation et de formation des professionnels, « et bien sûr, le Congrès est un moment important pour ça. La commission de la FNCF sur l’attractivité et la formation aux métiers traite aussi de l’inclusion, qui est un sujet motivant et fédérateur ». L’association a d’ailleurs conçu un module de e-learning, qui permet à toute personne travaillant dans un cinéma de faire le tour du sujet en 15 minutes, « première étape de sensibilisation lorsqu’on est destiné à accueillir du public et à le renseigner ».

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L’association met aussi en avant le potentiel de l’audiodescription en matière de médiation. « Avec l’Acrira (Association des cinémas de recherche indépendants de la région alpine), le Grac (Groupement régional d’actions cinématographiques) et Passeurs d’images, nous formons des médiateurs cinéma à Lyon, et partageons ensuite le compte-rendu détaillé, écrit ou filmé, des ateliers. » Ciné Sens a ainsi réalisé une vidéo retraçant l’audiodescription du film d’animation Jean-Michel le caribou et les histoires d’amour interdites (Cinéma Public Films), de sa conception jusqu’à sa projection, en passant par la phase technique de l’enregistrement et des ateliers menés par Sandrine Dias, autrice de l’audiodescription du film. « Cela permet de montrer comment on peut travailler avec un distributeur, un réseau de salles et des associations, pour mettre en valeur la version audiodécrite d’un film… et au final parler de cinéma ! »

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Parler de cinéma… en parlant de son accessibilité, c’est aussi s’adresser au plus grand nombre. Pour Cécile Dumas, « chacun d’entre nous peut se retrouver en situation de handicap à un moment, et une meilleure accessibilité pour des déficients bénéficie à beaucoup de monde ». Le sujet de l’inclusion progresse dans la société en général –  « c’est notamment devenu une évidence pour la jeune génération » – et un cinéma qui communique sur son accessibilité donne une bonne image auprès du grand public. « Toute la chaîne doit s’engager, pas seulement pour justifier de sa mise au norme face à la commission, mais pour proposer une démarche et une programmation de qualité. »

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*Mémo mentions
AD
signale un film disponible en audiodescription permettant aux aveugles et malvoyants de suivre le film grâce à ce commentaire audio décrivant les images du film.
ST-SME indique une version sous-titrée pour sourds et malentendants, en majorité des versions françaises, mais pour des versions originales. C’est pourquoi la mention VFST n’est plus (ou de moins en moins) utilisée.
HI signale une version avec renforcement sonore du film pour mettre en valeur les dialogues et recevoir ce son dans un casque individuel.

Sandrine Dias présente l'audiodescription qu'elle a réalisée pour Jean-Michel le Caribou

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