En attendant Avatar 2 : se (re)préparer à la 3D… et au-delà ? [2/2]

Avatar 2 ©Walt Disney Company

Si le premier Avatar a été LE film de l’avènement de la 3D en 2009, et un accélérateur de la transition numérique des salles, le 2e opus sera-t-il celui du retour à la 3D et par extension, une ouverture vers d’autres technologies ? Partie 2 avec Mathieu Guetta, référent exploitation à la CST, Marion Rosset, présidente d’ADDE, Étienne Roux, directeur général de Ciné Digital et Loran Abadie de RealD.

Réviser son matériel et commander des lunettes

Se préparer, c’est bien la question pour tous les cinémas. Et la plupart d’entre eux se préparent donc à minima à ressortir les lunettes. Pour Mathieu Guetta, l’un des deux référents exploitation à la CST, l’arrivée du nouvel Avatar est évidemment un sujet d’échanges avec les salles pour lesquelles « il s’agit de vérifier le bon fonctionnement de leur matériel 3D, dès que possible . 

Du côté des installateurs, Marion Rosset, présidente d’ADDE, installateur et fabricant d’équipements cinéma, confirme la nécessité de vérifier et refaire tourner son matériel s’il n’a pas été utilisé depuis longtemps. « Il est aussi nécessaire de vérifier que les émetteurs 3D fonctionnent et s’assurer de bien dépoussiérer le système ainsi que le hublot, sinon on peut perdre énormément de lumière. » Étienne Roux, directeur général de Ciné Digital, installateur, insiste sur la nécessité d’anticiper ses besoins. Concernant la 3D active, la remise en service des lunettes représente « un travail conséquent. Il faut veiller à changer les piles et vérifier qu’elles n’ont pas coulé. Quant aux lunettes rechargeables, si elles ne sont pas utilisées régulièrement, elles peuvent mourir ». Les coûts de gestion du personnel pour l’entretien et la collecte des lunettes sont donc à considérer, même si la technologie active est reconnue pour la qualité de sa 3D. « Les panneaux de cristaux liquide des lunettes polarisent chaque œil, grâce à son électronique embarquée. Le filtre qui est à installer devant le projecteur, peut être rapidement déplacé d’un appareil à l’autre, et permet également une projection sur écran blanc » explique le directeur. Quant à la 3D avec lunettes passives, elle présente l’avantage d’une gestion plus facile. 

Les conseils de Mathieu Guetta, référent exploitation à la CST

Pour les salles qui avaient progressivement abandonné la 3D, il s’agit de bien préparer la sortie d’Avatar en vérifiant le bon fonctionnement de son matériel dès que possible et procéder à quelques révisions.
Pour ce qui est des systèmes passifs, il n’y a rien à vérifier sur les lunettes elles-mêmes, sauf à les nettoyer si elles n’ont pas servi depuis longtemps et racheter un stock de lingettes pour le public. En revanche, les lunettes des systèmes actifs fonctionnent avec piles, soit des petites piles plates qu’il faut changer au besoin, soit des batteries rechargeables. Pour ces dernières, il faut s’assurer non seulement du bon fonctionnement des lunettes mais aussi du bon fonctionnement de l’armoire de rechargement.
Ensuite, dans un système comme dans l’autre, il faut procéder à un test. Pour cela les mires de la CST, téléchargeables sur notre site, permettront de vérifier que la stéréoscopie fonctionne et que l’œil droit est bien à droite et que l’œil gauche est bien à gauche. Par ailleurs, en chargeant leurs macros 3D, les salles vérifieront, en même temps, que le mécanisme de leur kit 3D est toujours en état et constateront par elles-mêmes si tout fonctionne. Comme par exemple l’ajustement du délai, si elles changent de modèle de lunettes actives. Ou la vérification de la superposition des images si elles sont équipés d’un kit RealD-X.L.
Enfin, il est essentiel de prévoir le déplacement de son installateur pour vérifier, et éventuellement corriger, la calibration (lumière derrière les lunettes et bonne colorimétrie) afin que tout soit parfait pour la sortie du film.

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Loran Abadie, chez RealD, confirme. « La technologie passive est beaucoup plus simple et la plupart de nos clients, dotés d’écrans métallisés, se sont attaqués au dossier depuis trois mois, pour savoir si leurs équipements étaient compatibles avec le HFR et pour s’assurer la meilleure 3D possible ». La société américaine spécialisée en 3D passive et détentrice notamment d’un brevet basé sur un procédé de filtre, placé devant le projecteur et polarisant alternativement l’image, a mis à disposition des exploitants une mire de vérification de la 3D via un QR code, « pour déterminer ensuite quel est l’équipement adéquat ». Au moment de la sortie du premier Avatar en 2009, les écrans métallisés étaient à leur début et les progrès depuis sont considérables. « Certains exploitants ont fait le choix d’investir dans l’écran métallisé “ultimate”, fabriqué dans la masse et nettoyable, qui évite le “ghost” (image fantôme) et le “speckle” (scintillement), notamment avec le laser RGB. La société a développé différents systèmes de filtres comme le XL qui récupère la lumière perdue, et pour lesquels nous avons un brevet exclusif ».

Marion Rosset se veut rassurante sur la palette de formats « le choix de la technologie dépend de l’endroit ou l’exploitant place son curseur d’exigence, de ses possibilités et de ses besoins. Reste que dans tous les cas, il faut prévoir de s’approvisionner et notamment en lunettes, même si nous avons anticipé la demande pour les lunettes passives ». Chez Ciné Digital aussi l’anticipation est le maître mot. « Nous avons pris les devants et avons acheté beaucoup de lunettes passives et de kits. Mais les salles doivent absolument anticiper : pour l’instant il y a du stock, mais à partir de septembre ce sera plus compliqué. » Du côté de chez RealD, on rappelle que « les coûts de transport des lunettes depuis la Chine sont très variables, et les délais d’environ trois mois. Avatar 1 nous donnera une indication : nous devons nous assurer d’avoir suffisamment de stock car nous servons toute l’Europe et les plus grands groupes. Mais nous avons des stocks tampons et avons sensibilisé nos clients à ce sujet ». 

S’il n’y a pas pénurie de lunettes et si l’on procède à des tests en amont, « il n’y a donc pas vraiment de débat sur la 3D ». En revanche, pour Étienne Roux comme pour Marion Rosset, « l’idéal est de tester sa 3D avec le HFR et surtout d’appeler son installateur pour savoir si son équipement est compatible. » 

Se souvenir du HFR

Car le format n’est pas encore si fréquent, et la fluidité qu’il propose pour la projection 3D peut aussi contribuer au caractère exceptionnel du film de James Cameron. Le HFR (High Frame Rate) désigne les cadences élevées d’images par seconde. « On les considère élevées à partir de 48 images par seconde en 2D, soit 96 i/s en 3D. Le Hobbit de Peter Jackson était par exemple en 2K, 3D, HFR à la cadence de deux fois 48i/s », rappelle Mathieu Guetta. En 2019, Gemini Man, tourné par Ang Lee à 120 images par seconde, a été projeté par la plupart des salles en HFR 60 i/s, soit la cadence utilisée par la plupart des jeux vidéo. « Les exploitants ont donc connu ce format, couplé à la 3D en 2K, mais ne l’ont pas utilisé depuis plusieurs années », souligne Étienne Roux, précisant que « les visites annuelles préventives, dans les cadre des contrats de maintenance de Ciné Digital, donnent l’occasion de vérifier ».

En revanche, le référent de la CST fait remarquer que « si l’on veut faire du 4K HFR, ça commence à devenir compliqué avec l’équipement actuel », sachant que le procédé ne sera possible seulement dans quelques salles en France. 

Et la luminosité dans tout ça ?

HFR ou pas, « tous les systèmes 3D baissent le niveau de lumière des projecteurs », soulignait récemment Mike Bradbury, directeur technique d’Odeon Cinemas. Marion Rosset, rappelle que les lunettes passives absorbent 20 % de la lumière et les lunettes actives 40 %. Il est donc nécessaire de procéder aux réglages adéquats. Pour le xénon, dans le cas où la lampe ne serait pas récente, « nous préconisons d’utiliser une lampe plus puissante pour les projections en 3D. La difficulté étant que celle-ci risque d’être trop puissante pour des projections en 2D et implique donc de projeter uniquement de la 3D dans la salle dédiée ». La présidente ajoute que « pour le laser, les plages de réglages de la luminosité sont plus larges et plus simples que le xénon. On va pouvoir dimensionner afin d’atteindre la norme préconisée par la CST entre 5,5 et 7 Foot-Lambert sur le centre de l’écran. » Pour la 2D, cette norme se situe à 14.

Les mires de la CST, téléchargeables sur leur site, permettront de vérifier que la stéréoscopie fonctionne. ©CST

Mais si l’image laser peut offrir plus de contraste, notamment en 3D, « certains préfèreront encore le xénon », selon Etienne Roux, quand Mathieu Guetta estime que « le laser ne présente pas d’avantage particulier pour la 3D par rapport au xénon », à condition, là encore, d’avoir une lampe qui donne encore toute sa puissance. En parallèle, le référent de la CST signale tout de même que « les anciens serveurs (DCP-2000 et Showvault de la marque la plus répandue en France) sont de plus en plus proches de l’obsolescence et que leur renouvellement serait à prévoir comme dépense prioritaire des deux années à venir ».

La question, bien entendu, dépasse l’arrivée d’Avatar. Mais on peut supposer qu’un tel film, alors qu’il s’agit plus que jamais de mettre en avant le grand écran, influencera les choix en matière de renouvellement du matériel numérique qui s’impose à tous. Pour le directeur de Ciné Digital, « le laser est plus un choix économique – pas de remplacement de lampe coûteuse –  et écologique, car moins de déchets ». On sait aussi que le CNC, dans son récent bilan énergétique des salles de cinéma, préconise le passage au laser pour des économies d’énergie. Mais ça, c’est au-delà de Pandora. Car pour James Cameron comme pour Frédéric Monnereau, la technologie est d’abord au service « d’une expérience de cinéma unique et incroyable  ».

Avatar 2 ©Walt Disney Company

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