Le grand rendez-vous des exploitants européens, qui est aussi la convention annuelle de l’Union internationale des cinémas (Unic), s’est ouvert ce matin à Barcelone. Il y a quelques jours, la CEO de l’Unic Laura Houlgatte évoquait les défis à relever pour défendre le secteur auprès du nouveau parlement européen.
Ce matin à Barcelone, le président de l’Unic, Phil Clapp, et Laura Houlgatte sa directrice générale, ont rappelé les bonnes performances des cinémas européens en 2023 – une hausse de 21,6 % des entrées et de 23,7 % du box-office – en soulignant à la fois l’importance des films locaux et la capacité des salles à innover. Le classement des “Giants of Exhibition”, établi avec Boxoffice Pro, a aussi été présenté, tandis que Laura Houlgatte a souligné la mission de l’Unic auprès des législateurs de Bruxelles, comme elle nous en faisait part dans un entretien réalisé au moment des élections européennes.
À l’orée du nouveau chapitre politique qui s’ouvre pour les instances européennes, quel bilan tirez-vous des actions de l’Unic au cours du mandat 2019-2024 ?
Laura Houlgatte : Les cinq dernières années ont été particulières, car marquées par la crise du Covid. Mais même si, de 2020 à 2022, nous étions particulièrement concentrés sur les soutiens et aides des États aux salles, cela ne nous pas pas empêchés d’avancer sur d’autres sujets, comme le volet MEDIA du programme Europe Créative, la durabilité et le maintien de l’exception de géoblocage pour les droits audiovisuels – qui, voté en décembre dernier, est sans doute notre plus gros “succès”. Reste que les méthodes de travail imposées par la période, notamment en distanciel, ont pu compliquer les échanges d’informations et notre travail de lobbying autour de la salle de cinéma, qui est avant tout un lieu de rencontre physique. Et à ce titre, nous avons repris les nombreuses projections que nous avons l’habitude d’organiser pour les membres du parlement.
Quelle place peut occuper l’exploitation cinématographique parmi les préoccupations européennes plus “majeures” ?
En effet, nous devons nous insérer parmi d’autres gros sujets en cours, comme la défense ou la compétitivité économique. Un des éléments les plus déterminants sera de savoir si nous restons toujours dans le périmètre de la commission Marché unique – ce qui est le cas de tous les “sujets” audiovisuels depuis 2014 – ou si nous retournons dans celui de la commission Culture.
Comment projetez-vous vos futures relations avec le nouveau parlement ?
Avec 50 % de nouveaux élus attendus, et avec un Parlement qui a pris un virage plus à droite, nous allons devoir, au-delà des sujets, repenser les logiques de groupe. Il y a un gros travail de pédagogie à mener auprès des nouveaux élus.
Les débuts de mandats sont toujours un challenge et font partie des moments les plus excitants de notre travail, au service d’un secteur que tout le monde apprécie et qui bénéficie toujours d’une image très positive. Lors de la précédente mandature, beaucoup de députés se sont exprimés en faveur des salles. Avec beaucoup d’échéances qui arrivent, comme la territorialité des droits d’auteurs et le programme Europe Creative Media qui est entré dans une nouvelle étape, il nous faut construire à nouveau une base solide de parlementaires sur lesquels compter.
Et pour ce faire, vous avez déjà affûté vos arguments !
Après notre manifeste publié fin 2023, notre brochure consacrée à l’innovation parue en avril dernier et en attendant le bilan Unic 2024 qui sera dévoilé à CineEurope, nous partagerons notre rapport sur le rôle culturel, économique, social, mais aussi démocratique des cinémas avec l’ensemble des députés. Il s’agit d’une étude que nous avons menée avec la Cicae et Europa Cinemas, et par laquelle tous les cinémas de l’Union européenne parlent d’une seule voix.
Le rendez-vous de Barcelone se tient pile à mi-parcours de l’année 2024. Quelles sont les grandes tendances que vous observez dans les pays de l’Unic ?
Si l’année 2023 a été positive, tant en termes d’entrées que de box-office sur grand nombre de nos territoires, l’effet des grèves des scénaristes et acteurs américains s’est – comme on s’y attendait – fait sentir sur le premier semestre 2024. Il y a toutefois des pays qui ont tiré leur épingle du jeu au premier trimestre, des “habitués” comme la France, mais aussi l’Italie, la Finlande, la Pologne et la Roumanie, avec des titres locaux qui y ont cartonné. Nous avons cependant grand besoin de sorties de gros titres US !
Observez-vous des évolutions significatives pour CineEurope 2024 ?
Cette année, nous comptons d’autant plus de premières participations qu’avec la hausse des prix des voyages, pour les exploitants basés en Europe, le rendez-vous barcelonais a plus de sens qu’un déplacement au CinemaCon. Avec sa diversité de séminaires et d’occasions de networking, CineEurope est le lieu où tout le monde se retrouve, échange sur ce qui s’est passé et ce qui va arriver, comme les nouveaux concepts de salles et les enjeux RH. Sans compter, bien entendu, les présentations des distributeurs et studios, de Studiocanal à Disney, en passant par Crunchyroll, Sony, Universal, Paramount, Angel Studios, et Mubi qui s’est joint à nous cette année pour présenter ses sorties salles.
Propos recueillis par Aysegül Algan
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