L’institution de contrôle relève une offre de qualité inégale sur la part collective du pass Culture, et estime que « l’éducation artistique et culturelle ne peut pas avoir pour fonction d’assurer l’équilibre économique voire la survie d’acteurs culturels qui y trouveraient un débouché ».
Il y a deux mois, la Cour des comptes rendait ses observations sur la part individuelle du pass Culture qu’elle préconisait de réformer, notamment parce qu’il ne remplissait pas suffisamment ses objectifs de démocratisation culturelle. Elle saluait dans le même temps la part collective du pass qui, elle, repose « sur le travail de médiation des enseignants ».
Pourtant, dans son rapport du 14 février portant sur “L’éducation artistique et culturelle au bénéfice des élèves de l’enseignement scolaire”, la Cour estime au sujet de cette part collective qu’il est « indispensable de resserrer son pilotage, de mieux cadrer les conditions de référencement des acteurs culturels, en privilégiant les grands dispositifs institutionnels, et de procéder à des contrôles ex post quantitatifs et qualitatifs des prestations financées ».
En effet, le rapport fait le bilan général d’une politique d’éducation artistique et culturelle présentée comme prioritaire par le gouvernement, mais dont « l’objectif est encore loin d’être atteint, tant du point de vue de la généralisation que de la réduction des inégalités culturelles ». Non pas par un manque de moyens selon la Cour, mais à cause d’une « organisation générale insuffisante ». En 2023, l’État a consacré près de 3 Md€ à l’éducation artistique et culturelle et les collectivités territoriales ont dépensé environ 600 M€. Et si le déploiement de l’application Adage, par l’éducation nationale en 2020, et la création d’une part collective du pass Culture en 2021 marquent une étape importante, on constate, pour l’année scolaire 2023-2024, que les collèges et les lycées n’ont mobilisé que 64 % de leur enveloppe du pass Culture.
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On sait qu’en ce début 2025, dans un contexte de restriction budgétaire, l’Éducation nationale a décidé de geler au 31 janvier les crédits alloués à la part collective pour l’année scolaire en cours, soulevant l’inquiétude des acteurs culturels, et notamment des salles de cinéma. La Ministre a ensuite tenté de rassurer et souhaité que le dispositif soit évalué par l’inspection générale. Or selon la Cour des comptes, dont l’enquête a été menée en 2024, la création de la part collective « a donné lieu au développement d’une offre pléthorique, répondant à une logique de guichet », ce qu’elle reprochait aussi à la part individuelle. « Le cadrage minimaliste et juridiquement fragile du référencement des acteurs culturels pour la part collective ne permet pas un contrôle effectif de la qualité », ajoutent les magistrats, qui estiment que « l’éducation artistique et culturelle ne peut pas avoir pour fonction d’assurer l’équilibre économique voire la survie d’acteurs culturels qui trouveraient un débouché dans l’animation culturelle pour les scolaires ».
Par ailleurs, au-delà des différences géographiques et sociales d’accès aux offres, la Cour relève des inégalités selon les classes au sein des établissements, où les activités reposent d’abord sur la volonté et la « culture personnelle du professeur », et « une participation très inégale des collectivités, qui sont pourtant des partenaires importants ». En outre, depuis décembre 2021, « le Haut Conseil de l’éducation artistique et culturelle n’est plus réuni par les ministres de la Culture et de l’Éducation qui le co-président, et la concertation État-collectivités est à l’arrêt au plan national ».
La Cour des comptes en appelle donc à mettre en place, dès 2025, un suivi effectif de tous les projets d’éducation artistique et culturelle dès la maternelle, qui passe notamment par la formation des enseignants. Pour la part collective du pass Culture, elle préconise de « sécuriser réglementairement la procédure de référencement » et de « la resserrer autour de dispositifs nationaux ou territoriaux incluant une procédure d’évaluation périodique obligatoire ».
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