L’Arche : Villerupt accueille un nouveau site multiculturel

©Bartosch Salmanski

Le 4 mars, la ville de Meurthe-et-Moselle, à la frontière du Luxembourg, inaugure son site dédié aux arts numériques et au cinéma.

La petite ville de Lorraine, que l’on connaît pour son historique Festival du film italien, se dote d’une nouvelle salle de cinéma. Adossée au mur de l’ancienne usine sidérurgique de Micheville, désormais écoquartier, L’Arche sort de terre. Deux années de travaux ont été nécessaires à l’architecte Émilie Bourdier, du cabinet K Architectures, pour ériger les trois niveaux de cet établissement de 2 400 m², 70 mètres de longueur et 13 de hauteur.

Le projet, mené par la communauté de communes du Pays-Haut Val d’Alzette, qui a investi 3 millions d’euros, a essuyé de nombreuses critiques face à un budget total conséquent de 13 millions d’euros. Financé également par la Ville, le Département, la Région, l’État et le fonds Feder de l’Europe, le bâtiment impose des frais de fonctionnement estimés à 600 000 euros par an.

Une salle de cinéma et une salle polyvalente

Le tiers-lieu, qui sera dédié aux arts numériques et au cinéma, abrite des studios, une salle d’exposition, un médialab, un bar-restaurant, une grande salle de spectacle de 1 140 places debout et 750 assises – avec un écran fixe et qui peut se transformer en salle de cinéma – et une salle de 150 fauteuils. Ces dernières sont équipées de projecteurs Barco laser 4K. L’ouverture au public est prévue le 9 mars après l’inauguration officielle du 4 mars. Julien Floria, le directeur du site, envisage une moyenne de 18 séances sur les jours d’ouverture, du mercredi au dimanche, avec une programmation mixte, à 80 % grand public et 20 % art et essai, visant les labels Jeune Public et Patrimoine. Le prévisionnel de fréquentation se situe entre 25 000 et 30 000 entrées pour l’exploitation classique. À l’appui, sont déjà prévues des sorties nationales, tout comme des cycles, rétrospectives, ciné-débats, rencontres et nuits thématiques, festivals… sans compter la programmation et les animations pour les enfants. Le grand parvis pourra aussi accueillir des projections en plein air. L’association le Pôle de l’image, qui gère la salle Rio du centre-ville et le Festival italien, prend en charge la programmation cinéma et les dispositifs d’éducation à l’image en collaboration avec l’Arche ; le Rio restera en activité pour les événements ponctuels.

Sur l’ensemble du site, le directeur annonce quelque 61 spectacles, y compris jeune public et musique, et 125 temps d’actions culturelles, conférences, ateliers périscolaires. La fracture numérique est une préoccupation pour Julien Floria, qui souhaite « que l’on puisse proposer des outils qui vont au-delà du cadre scolaire et surtout créer des vocations ».

Et pour cette nouvelle année, le site lorrain a aussi été désigné vaisseau amiral en France des événements liés à la nomination de la ville luxembourgeoise d’Esch-sur-Alzette comme capitale européenne de la Culture. Occasion parfaite pour faire rayonner le lieu. L’Arche sera également au cœur du Festival du film italien de Villerupt, avec des projections dans les deux salles. Pour rappel, la ville accueille chaque année, pendant deux semaines, le plus gros événement dédié au cinéma italien en France, avec quelque 70 films pour environ 40 000 spectateurs.

Un site imprégné de son passé sidérurgique

Le centre culturel prend place sur les traces d’un ancien haut fourneau qui témoigne de la longue histoire de l’industrie sidérurgique à Villerupt, aujourd’hui peuplée de 10 000 habitants. Ce mur épais de pierre, édifié au temps des exploitations minières du XIXe siècle, soutenait la plateforme technique haute où était déchargé le minerai avant d’être acheminé dans les aciéries en contrebas. La commune passe de 561 habitants en 1861 à 16 300 en 1966, fruit d’une immigration italienne importante. Dans les années 1950, l’industrie sidérurgique est florissante à Villerupt, notamment grâce à l’usine de Micheville, qui emploie 4 500 personnes, avant son arrêt brutal en 1971 ; elle est finalement démantelée en 1986.

Cette zone sinistrée a intégré une opération d’intérêt national (OIN), à laquelle s’applique un régime juridique particulier. En travaux depuis cinq ans, ce nouveau quartier prévoit 1 900 logements ainsi qu’une école à l’horizon 2026.

Aujourd’hui, L’Arche « emprunte et réinterprète le langage des murs alvéolés de la vallée de l’Alzette, vestiges, eux aussi, de l’architecture sidérurgique du XIXe siècle », décrit l’architecte Émilie Bourdier. Son volume brut taillé en biseau se profile en rampe monumentale jusqu’aux hauteurs de la muraille. « Le projet s’inspire également d’un référent universel bâti au siècle dernier sur la côte sauvage de l’île de Capri, la Villa Malaparte, icône de l’architecture rationaliste italienne qui incarne à elle seule le cinéma. » L’architecture intérieure reflète le même minimalisme contemporain, avec un hall au grand volume baigné de lumière. Pour le directeur Julien Floria, ce site se doit « d’être le plus simple et accessible possible. La désacralisation de la Culture est un enjeu puissant. Je souhaite que les gens se sentent bien dans ce lieu et surtout prennent du plaisir. »

La zone de chalandise de l’Arche ne présente que peu de salles de cinéma. Les sites les plus proches se situent au Luxembourg, avec notamment le Kinepolis Belval à Esch-sur-Alzette (à moins de 10 km au nord). Sur le territoire français, le Kinepolis Longwy se situe à 20 km au nord-ouest (7 salles et 240 000 entrées en 2019) et le Kinépolis de Thionville à 25 km au sud-est (10 salles et 565 000 entrées en 2019). Outre ces multiplexes, la zone reste assez faible en équipement cinématographique, Metz se trouvant à 55 km au sud et 45 mn de route.

©Bartosch Salmanski

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