
Après une ouverture éclair de quatre jours en juin 2024 pour fêter le rachat des murs, La Clef Revival a entamé une série de travaux pour moderniser le cinéma associatif du Quartier Latin. Toujours en quête de financements pour assurer le bon fonctionnement de l’établissement et finaliser la rénovation, le collectif s’est rendu à New York pour récolter des fonds, et présenter des séances dans des cinémas indépendants.
Passé le soulagement du 17 juin 2024, date de la signature actant le rachat de La Clef, le collectif La Clef Revival a dû rapidement remettre la main à la pâte. Désamiantage, mise aux normes, plâtrerie… En vue d’une ouverture en septembre prochain, le cinéma du 5e arrondissement, dont la particularité est le mode de gestion collective, est en plein chantier. Alors qu’ils devaient encore trouver 300 000 €, plusieurs membres du collectif se sont rendus à New York début mars, afin de réaliser une nouvelle levée de fonds, et rencontrer d’autres community theaters. Une démarche qu’ils avaient déjà entreprise en Europe, notamment grâce au réseau Kino Climates, regroupant plusieurs cinémas et ciné-clubs alternatifs européens.
Ce voyage américain était une manière « d’étendre notre réseau aux États-Unis, en rencontrant des salles aux profils très variés, mais qui sont dans une même précarité juridique en termes de maintien de leur bail, explique Chloé Folens, membre du collectif. Même des lieux plus “institutionnels” subissent d’importantes baisses de subventions et une volatilité du mécénat plus importante que jamais ». Et la crainte d’être perçu comme « le petit projet parisien qui parle de son histoire » a vite été évacuée par l’accueil très chaleureux des exploitants américains, qui « avaient un profond besoin d’entendre et de raconter des récits d’organisation collective ». Six séances ont été présentées par les membres du collectif, de Une femme est une femme de Godard au Film Forum à Bye Bye Tibériade de Lina Soualem au Brooklyn Center for Theater Research, en passant par Dernier Marquis de Rabah Ameur-Zaïmeche au Spectacle. Et si la recherche de mécénat a rapporté 50 000 €, obligeant à relancer une campagne de dons en France, La Clef Revival reste confiant en son projet, car « il est concret ».
Cette expédition a permis de confirmer qu’à l’image de « la cinéphilie ouverte à d’autres luttes » de la Clef, aux États-Unis aussi certains cinémas sont « des espaces de résistance, ainsi que des ouvertures vers d’autres façons de faire commun », témoigne Chloé Folens. L’idée de « décloisonnement » est en effet au centre du projet parisien qui fonctionnera à prix libre, et proposera, aux côtés de ses deux salles, des studios de postproduction, un bar associatif ainsi qu’une bibliothèque en accès libre. Toute une organisation pour ne pas « clôre le temps de la projection sur lui-même et organiser un autre rapport à l’expérience cinéma », explique Albane Barrau, également membre de La Clef Revival. Cette approche a déjà fait ses preuves, le cinéma ayant affiché une excellente fréquentation pendant l’occupation par le collectif.
Rendez-vous donc en septembre. Et au moment où La Clef rallumera ses projecteurs, il sera difficile de ne pas penser à cette citation de Jean-Luc Godard affichée sur la façade Est du cinéma : « Ce qui me console, de toute façon, c’est de savoir qu’il y a toujours quelque part dans le monde, à n’importe quelle heure, quand ça s’arrête à Tokyo, ça recommence à New York, à Moscou, à Paris, à Caracas ; il y a toujours, dis-je, un petit bruit monotone mais intransigeant dans sa monotonie, et ce bruit, c’est celui d’un projecteur en train de projeter un film. Notre devoir est que ce bruit ne s’arrête jamais. »

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