Face aux récentes modifications apportées par les majors sur la fenêtre salle, CMX Cinemas, huitième circuit d’exploitation américain, appelle à une révision du partage des recettes distributeurs/exploitants.
Le mexicain Cinemax n’a fait son entrée dans le marché nord-américain qu’en 2017, mais sa branche CMX Cinemas a déjà intégré, avec 410 écrans répartis sur 40 sites en janvier 2020, le top 10 de l’exploitation US. Après l’arrêt des séances en mars dernier, elle devenait aussi la première à se mettre sous la protection du « Chapter 11 » de la loi sur les faillites aux États-Unis. Après une restructuration et la revente de certains de ses cinémas, le circuit est de retour sur les rails – il a rouvert certains de ses établissements depuis septembre dernier et prévoit d’en inaugurer de nouveaux cette année –, avec l’intention de changer, lui aussi, les règles du jeu.
Fin 2020, Luis Castelazo, le directeur financier de CMX Cinemas, adressait une lettre ouverte au secteur cinématographique américain appelant les studios à compenser le manque à gagner des salles, causé par le recours au day-and-date sur les plateformes de streaming, par une réduction de leur part distributeur sur les billets de cinéma. Invité du podcast du 21 janvier de Boxoffice Pro US, le responsable a expliqué sa position.
« La part distributeur n’a cessé d’augmenter au fil des années », note le CFO qui rappelait dans sa lettre qu’elle est passée d’une moyenne de 27 % dans les années 70 à une moyenne de 57 % en 2019. « Si les distributeurs réduisent ou éliminent notre fenêtre d’exclusivité, ils ne peuvent pas nous « facturer » le même pourcentage, alors que de toute évidence notre fréquentation va baisser. »
Mais comment chiffrer l’impact de cette exclusivité raccourcie sur le nombre de spectateurs dans les salles ? « Nous disposons de beaucoup de datas sur les films similaires sortis auparavant pour établir des comparaisons. Les pronostics du box-office américain ne sont pas toujours parfaits mais fiables. Nous devrions avoir des données solides sur les recettes que le film aurait obtenues en l’absence de leur disponibilité sur les plateformes. »
Reste encore l’inconnue de l’impact de la crise sanitaire sur la fréquentation d’un titre au cinéma. « Wonder Woman 84 a réalisé une bonne première semaine compte tenu du contexte de pandémie et malgré les restrictions de jauge », rappelle Luis Castelazo. « Les fans sont venus dès la première semaine. Mais alors que les entrées sur ce type de blockbuster restent élevées sur plusieurs semaines, et même s’il est difficile de faire la part des choses entre l’effet Covid et l’effet du day-and-date en streaming », pour le directeur financier de CMX Cinemas, le titre a connu une érosion précipitée de ses recettes.
En outre, une analyse de CMX Cinemas estime que la « réduction drastique ou l’élimination » de l’exclusivité salle réduit la fréquentation cinématographique de 30 % sur la semaine de démarrage et que dès lors, la part distributeur devrait être diminuée à environ 27 % pour garantir la rentabilité des salles.
Alors que le secteur cinématographique attend toujours la reprise, les changements structurels en cours semblent donc ne pas se limiter aux remises en question de l’exclusivité salle. « Les discussions étaient lancées même avant la pandémie. Peut-être que le partage de recettes en pourcentage n’a plus de sens. » Ce qui est sûr, c’est qu’il s’annonce comme un point-clé du réalignement des forces en présence.
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