Rencontre avec Cédric Aubry, président des Cinémas Confluences 

Face à un « nouveau normal » pas encore déterminé, le président des Cinémas Confluences – par ailleurs président de la branche de la moyenne exploitation à la FNCF – poursuit sa vision d’une exploitation aux dimensions maîtrisées, et ancrée au plus près de son public. 

Les sept Cinémas Confluences, composant un total de 34 salles, affichent sur l’année écoulée un total de 904 057 entrées, en progression de plus de 4 % par rapport à 2023. Une croissance « naturelle » selon Cédric Aubry, qui rappelle les deux Confluences ouverts après-Covid – à Sablé-sur-Sarthe (Sarthe) dès septembre 2020 et à Bar-le-Duc (Meuse) en mai 2021 –, suivi du doublement des écrans de Mennecy (Essonne) à l’été 2023, sans oublier la rénovation intégrale de Varennes à l’automne dernier (qui a ainsi tourné la majorité de l’année sur 6 salles au lieu de 9). 
Si l’exploitant se réjouit de la légère progression de son « petit » cinéma de Apt (Vaucluse) passé de 57 000 à 60 000 entrées, son Confluences de Sens dans l’Yonne (10 ans cette années) est toujours en recul de 20 % par rapport à 2019, tandis que le récent site de Bar-le-Duc stagne déjà. « Donc, au vu des investissements, et de l’endettement, la croissance, à date, de Confluences n’est pas si grande », estime l’entrepreneur.

La France qui souffre…

Cédric Aubry observe certes que les seniors sont de retour, « dynamisant les séances de l’après-midi ». De même que les jeunes qui se servent massivement du pass Culture : « un formidable levier pour faire venir un public qui n’en a pas les moyens »et qui représente plus de 5 % de la fréquentation de certains cinémas Confluences, mais qui peut aussi être vue comme « une perfusion », donnant l’impression à la jeune génération « que le cinéma n’est pas forcément payant ». Et enfin, au milieu de ces deux tranches d’âge, les jeunes actifs avec enfants, « qu’il a toujours été difficile d’aller chercher, mais qui aujourd’hui n’en sont plus à choisir entre aller au cinéma ou regarder Netflix mais entre aller au cinéma… ou remplir le frigo ». Les cinémas Confluences sont en effet implantés dans des villes petites et moyennes, « avec une majorité de spectateurs provenant des villages alentours, donc de la ruralité », et en prise avec des catégories géographiques et sociales « plus complexes qu’il y a quelques années ».

… et des cinémas qui font la fierté

Dans cette « vérité économique des petites agglomérations », Cédric Aubry ambitionne de mettre ces cinémas au service de la plus grande diversité – les sites de Sablé et de Varennes visant cette année, au même titre que les 5 autres Confluences, un classement art et essai. Sans oublier de maintenir leur dimension populaire, sur les écrans comme sur les tarifs – avec un tarif plein au-delà des 10 euros pour les spectateurs occasionnels, mais beaucoup de petits prix, dont ceux du mardi (une tradition gardée de l’époque du Cinéday) qui, pendant les périodes de vacances, « devient régulièrement le plus gros jour de la semaine ! » 

Mais la réponse la plus évidente que les Cinémas Confluences proposent à leurs publics et leurs difficultés, c’est la fierté de disposer d’un bel équipement cinématographique. « Dans ces villes où les habitants se plaignent du délitement des établissements scolaires, hôpitaux et autres services, le cinéma, une fois ouvert, devient un bien public », observe l’exploitant, en prenant pour exemple l’accueil enthousiaste réservé par les spectateurs à leur Confluences de Varennes rénové et premiumisé, qui a su conjuguer investissements et accessibilité tarifaire. « Mon boulot, c’est de résoudre cette subtile équation ; la premiumisation ne doit pas être un moyen d’augmenter ses marges, mais de susciter l’envie, et “créer” du public. »

Fréquentation : le réservoir local

Après deux années autour de 180 millions d’entrées annuelles, le secteur attend toujours de connaître « son nouveau normal ». Mais ce dont Cédric Aubry est d’ores et déjà sûr, c’est qu’après près de trois décennies de grands équipements « aspirateurs à entrées », le nouveau cycle de la proximité et de la rénovation a commencé. Dans cette dynamique, les mille mono écrans de France sont autant de lieux de vie qui maillent le territoire, mais offrent aussi des opportunités de redéploiement, « économiquement crédibles ». Ainsi, les deux prochains chantiers Confluences devraient débuter – d’ici la fin d’année, après la fin des recours administratifs –, à Carquefou en Loire-Atlantique et à Romilly-sur-Seine dans l’Aube. Dans cette dernière commune, le cinéma municipal historique, « à bout de souffle », va céder sa place à un complexe de 5 salles dans la logique de confort premium adoptée à Varennes (dont fauteuils électriques et son DTX et DTS X). Ici, comme à Controis-en-Sologne en Loir-et-Cher où il accompagne une nouvelle fois – après le Ciné Sologne voisin de Romorantin – la famille Fourneau sur un 3 salles, Cédric Aubry est persuadé de créer une nouvelle dynamique de fréquentation, car instaurée au plus près des publics. Ainsi, à l’heure du désengagement probable des collectivités sur ce type de projets, répondent toujours présents des indépendants privés… aux « ambitions collectives ».

Article publié dans le Boxoffice Pro n°485

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