Max Linder : le survivant

Dans notre nouvelle rubrique de l’été, nous vous proposons un tour d’horizon hebdomadaire de l’histoire et des singularités des cinémas mythiques de Paris. Cette semaine, nous nous rendons au Max Linder.

Max Linder, l’acteur comique qui a donné son nom au cinéma.
© Bibliothèque nationale de France

Après avoir vécu sous l’enseigne Kosmorama pendant deux ans, la salle est rachetée par l’acteur burlesque Max Linder, de son vrai nom Gabriel Leuvielle, en 1914. Elle ouvre le 18 décembre 1914 et est nommée Ciné Max Linder. La salle se présente d’abord comme un cinéma où il fait bon de se distraire en famille, à l’image de son gérant, très connu et apprécié des spectateurs et tête d’affiche de nombreux films à l’époque (Max asthmatique, Max et sa belle-mère, Amour tenace…). Pour autant, Max souhaite diversifier la programmation de sa salle et se tourne de plus en plus vers les États-Unis, en signant notamment en août 1916 un contrat avec les studios Essanay de Chicago. Des problèmes liés au climat contraignent Max Linder à revoir le nombre de films réalisés outre-Atlantique à la baisse (12 étaient prévus ; seulement 3 ont pu être réalisés avec succès). Cet échec commercial lui coûtera cher.

Max devient incapable de mener de front ses deux activités d’exploitant et d’acteur-réalisateur. Finalement, il est contraint de revendre son cinéma en avril 1918 à la société Omnia, qui le rénove puis le rouvre le 14 mars 1919. La programmation des débuts reste similaire à celle de l’ancien Ciné Max Linder et les films de son ancien gérant ont toujours une bonne place dans la programmation. Mais peu à peu, la place accordée à ses productions diminue et Charlot (Charlie Chaplin) lui vole la vedette. Sa carrière déclinante et son mariage raté avec une jeune femme le poussent au suicide le 31 octobre 1925.

Max Linder dans son film Seven Years Bad Luck, sorti le 6 février 1921.

Une nouvelle ère

Après la mort de son directeur iconique, le cinéma poursuit son développement. Connu à partir de 1929 sous le nom Max Linder Pathé (Max travaillait pour la firme au coq depuis 1905), le cinéma appartient jusqu’en 1936 à la société Marivaux, qui dispose déjà du cinéma du même nom. Le Max Linder Pathé entre ensuite, aux côtés du Marivaux, dans la Société des cinémas de l’Est, fondée au début des années 1930 par Léon Siritzky et ses deux fils. Le Max Linder, devenu la première salle d’exclusivité du circuit Siritzky, restera longtemps proche de la famille.

Après la Seconde guerre mondiale, le circuit est nationalisé et rénové. Pendant près de dix ans, la famille Siritzky mène une bataille administrative intense pour récupérer le cinéma ; elle y parvient enfin en 1954. Jusqu’en 1984, le Max Linder va présenter des exclusivités, notamment en s’associant avec Paramount en 1960 pour créer Parafrance. 

Finalement, le cinéma est racheté par par Jean-Jacques Zilbermann, réalisateur et metteur en scène de théâtre, et son équipe de cinéphiles, qui avaient déjà acquis L’Escurial. Il décide de détruire la salle pour en reconstruire une nouvelle. Le 28 novembre 1987, la nouvelle salle offre un écran panoramique et un son THX, avec des murs travaillés phoniquement, un système créé par George Lucas.

L’écran panoramique du Max Linder, inauguré en 1987.

Une salle mythique et plus actuelle que jamais

Aujourd’hui, ce même écran trône dans la salle du Linder. Du 29 novembre au 5 décembre 2017, le Linder en a célébré les 30 ans avec une programmation prestigieuse d’avant-premières et de reprises.

Cet écran est situé en plein coeur d’une salle mythique, au design intemporel, qui est la dernière de Paris, avec le Grand Rex, à posséder deux balcons. Trois niveaux la segmentent : l’orchestre de 268 places la mezzanine de 203 places au premier étage, dans l’axe du projecteur et le balcon de 109 places, situé au deuxième étage et qui permet de prendre un peu plus de hauteur.

Les trois étages de la salle du Max Linder Panorama.

Dans la salle du Linder, des cinéastes emblématiques se sont succédé à l’occasion de nombreuses avant-premières, à l’image de David Lynch venu présenter Inland Empire, de Francis Coppola pour son long-métrage Tetro et de Michael Cimino qui a offert une masterclass magistrale consacrée à La Porte du Paradis en 2005.

Aujourd’hui, le Linder continue à vivre en organisant des événements originaux. Par exemple, le cinéma organise les rendez-vous réguliers des Nuits au Max. Chaque nuit a sa propre thématique, qui peut être orientée autour de réalisateurs (récemment Kubrick ou Spielberg) ou d’une franchise particulière (John Wick, Spider-Man…). D’autres événements sont également organisés, comme le karaoké autour de La Reine des Neiges en 2015 ou des soirées événements à l’image de la soirée spéciale Johnny Hallyday où, l’année dernière, le Linder a projeté 3 films interprétés par le chanteur.

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