Le 1er avril, lors de la Convention internationale des cinémas à Las Vegas, le président-directeur général de Cinema United – anciennement NATO, soit l’association nationale des cinémas américains – a appelé à une redéfinition concertée des pratiques au sein de l’industrie, pour faire face aux défis persistants de la période post-pandémique.
Dans le traditionnel discours du “State of the Industry”, devant un parterre de professionnels américains et du monde entier, Michael O’Leary a identifié plusieurs leviers pour relancer durablement la fréquentation des salles : stabilisation des fenêtres d’exclusivité, coordination marketing, assouplissement des pratiques de programmation et investissements continus dans l’expérience spectateur. Le président de Cinema United a rappelé que, malgré des signes de reprise, l’industrie du cinéma n’avait pas encore retrouvé un équilibre durable. Il a mis en garde contre l’illusion d’un retour aux habitudes du monde d’avant ou la pérennisation des solutions transitoires mises en place durant la pandémie. Pour lui, il est nécessaire de construire un modèle fondé sur des objectifs communs, impliquant autant la distribution que l’exploitation.
Fenêtres d’exclusivité : plaidoyer pour une base commune
La question des fenêtres d’exploitation en salle a été centrale dans son intervention. O’Leary a plaidé pour une durée minimale de 45 jours, jugée nécessaire pour permettre à la plupart des films – en particulier ceux à budget moyen ou modeste – de trouver leur public et de générer des revenus suffisants. Il a présenté un graphique comparatif des différents marchés internationaux, soulignant que la France se distingue très nettement, à la fois par la longueur de sa fenêtre d’exclusivité et par le niveau de reprise du box-office, supérieur à celui des autres pays. Il y voit un argument en faveur de politiques plus lisibles et cohérentes, qui donnent de la visibilité au public et du temps aux films pour s’installer. Selon lui, la réduction des fenêtres nuit à la fréquentation, en particulier au-delà du top 20 des films les plus vus : les 80 titres suivants ont vu leur box-office chuter de 32 % par rapport à l’avant- Covid, contre 10 % seulement pour les plus gros succès.

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Marketing : améliorer la visibilité des films
O’Leary a également mis en avant le besoin d’une stratégie marketing renforcée, partagée entre studios et exploitants. Il a cité une étude montrant que la notoriété des nouveaux films avait fortement diminué, avec 38 % de titres en moins atteignant un niveau de reconnaissance significatif avant leur sortie. Il a appelé à un effort collectif pour atteindre un objectif de 50 % de notoriété sur toutes les sorties nationales, et recommandé de ne plus promouvoir les options de visionnage à domicile pendant que les films sont encore à l’affiche. Le slogan “Only in Theatres” devrait, selon lui, retrouver une place centrale dans les campagnes de communication.
Programmation et accès : plus de souplesse attendue
Le président de Cinema United a exprimé des critiques à l’égard de certaines contraintes imposées aux exploitants, comme la programmation tardive de films familiaux, peu adaptée à la réalité des publics. Il a plaidé pour une meilleure prise en compte des spécificités locales, en particulier pour les cinémas indépendants et ceux des zones rurales, qui doivent selon lui bénéficier d’un meilleur accès aux films dès leur sortie.
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Qualité de l’expérience : un enjeu de fidélisation
Enfin, O’Leary a rappelé l’importance de maintenir des standards élevés dans l’expérience en salle, quel que soit le type de format. Il a noté que les plus grands écrans (PLF, Imax…) représentent aujourd’hui 9 % du box-office mondial, mais ne doivent pas devenir l’unique justification du déplacement en salle. Il a insisté sur la nécessité d’offrir une expérience premium dans chaque salle, de l’accueil à la projection, en passant par la restauration ou l’ambiance des espaces communs.
« Nous devons faire les choses autrement »
En conclusion, Michael O’Leary a lancé un appel à une concertation ouverte entre studios, exploitants et distributeurs, afin de faire évoluer les pratiques dans un esprit constructif. « Le monde n’est plus celui d’hier, et si nous voulons exploiter pleinement notre potentiel collectif, nous devons faire les choses autrement. » Il a invité l’ensemble des parties prenantes à adopter de nouveaux modèles de coopération, pour mieux répondre aux attentes du public, relancer l’attractivité des salles et restaurer la dynamique économique de l’ensemble de la filière.
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