Le cinéma en construction dans la commune héraultaise, située entre la Méditerranée et l’étang de Thau, a été repris par un quatuor d’exploitants locaux, autant portés par les perspectives du projet que par la dynamique de leur collaboration.
Cela fait 20 ans que le CinéMistral est indissociable du nom – et de l’énergie – de sa directrice Priscilla Schneider, et déjà de nombreuses années que cette dernière prépare l’avenir du mono-écran de 152 places, qui sera remplacé par un complexe de 4 salles et 560 fauteuils. La DSP de l’établissement municipal étant assurée depuis 2017 par le GPCI, c’est tout naturellement à Charles Vintrou, directeur général du Geci, et Réginald de Guillebon, son président, que la Ville a confié le projet du nouveau cinéma. Et lorsque le Groupement prend la décision de ne pas le poursuivre, Charles Vintrou et Priscilla Schneider cherchent de nouveaux associés pour racheter la SAS Cinémas Frontignan, dont la directrice du CinéMistral détient 15 % des parts.
Elle les trouvera tout près, en ses confrères et consoeurs de la région. « C’était une évidence, de par l’amitié professionnelle qui nous lie depuis 25 ans que nous nous connaissons », se réjouit Priscilla Schneider, en décrivant comment Isabelle Moreau, Frédéric Perrot et Jean Villa ont rejoint l’aventure. Tous ont déjà une solide expérience de la construction d’un cinéma : Isabelle Moreau avec son Travelling à Agde, distant de 30 km, Frédéric Perrot avec le Clap Ciné de Leucate, un peu plus loin sur le Golfe du Lion – sans compter le Clap Ciné du Canet voisin et le New Vox de Langres côté Haute-Marne, en compagnie de Jérôme Quaretti –, et Jean Villa, avec les nombreux projets de Sagec-Véo Cinémas, dont le dernier en cours à La Cartoucherie à Toulouse. « Il y a une vraie cohérence à travailler ensemble, à l’échelle du territoire », explique le directeur général de Véo Cinémas, qui assure par ailleurs les DSP du Comoedia et du Nouveau Palace, 3 salles chacun, dans la ville de Sète toute proche. C’est d’ailleurs l’entente Véo qui assurera la programmation du nouveau cinéma de Frontignan, « afin de créer du sens et de la continuité entre les établissements ».
Un projet thautal
Entre logique professionnelle et cohérence territoriale, les nouveaux associés peuvent aussi compter sur la complémentarité de leurs compétences et de leurs points de vue. Sachant que le projet est né d’une volonté politique forte, portant sur la requalification d’une friche viticole de centre-ville en un pôle culturel incluant une librairie, un bar à jeux et un restaurant, les nouveaux associés décident, comme l’explique Isabelle Moreau, « de se recentrer sur ce qu’on sait faire, soit le cinéma ».
La construction de la coque du bâtiment a été portée par Territoires 34, la société d’urbanisme d’économie mixte du Conseil général, en partenariat avec la Ville. Les nouveaux associés ont de leur côté retravaillé les plans intérieurs en compagnie de Thierry Raspaud. Si l’architecte n’a, pour l’heure, que le cinéma de Canet à son actif, son expérience de l’aménagement pour la grande distribution lui a appris à « optimiser le moindre m², pour limiter les coûts, tout en tenant compte de la pratique concrète d’un cinéma dont les axes principaux seront la convivialité, le contact humain et le confort », relève Frédéric Perrot.
Le bâtiment leur étant livré dès la fin de ce mois de septembre, les exploitants attaqueront les travaux d’aménagement dès que possible, avec un budget de 2,6 M€ HT. Le tout, pour une ouverture entre fin mai et fin juin 2025, « en tous les cas, avant la prochaine Fête du Cinéma », espèrent les intéressés, qui visent les 120 000 entrées annuelles – après les 52 000 comptabilisées sur le mono-écran de la commune en 2023 –, toujours avec le classement art et essai et le label jeune public. Mais dans un bassin de 124 000 habitants, « nous espérons sincèrement faire un peu plus », confie Isabelle Moreau. « Pour autant, nous ne sommes pas naïfs : bien sûr que nous aurons des obstacles à surmonter. Mais nous partons à quatre et c’est tellement dynamisant de mettre enfin ensemble nos compétences et nos envies. »
Tout le projet est, de fait, source d’inspiration pour réfléchir à la salle de demain, avec une dimension écologique affirmée, de ses anciens chais viticoles réhabilités à son parking gagné sur un terrain dépollué, de l’autre côté du canal, relié par une passerelle piétonne. De quoi faire du cinéma un champion de l’accessibilité en mobilités douces, y compris en paddle ou en pédalo ! « La situation inédite de ce projet développe notre imaginaire », confirme Priscilla Schneider, en assurant que « les fondations d’un cinéma convivial, familial, authentique posées au CinéMistral vont se poursuivre. Nous sommes riches de ce que nous avons a vécu ici, alors nous avons qu’une envie, c’est de continuer et se réinventer », conclut la directrice, visiblement émue d’entamer la dernière étape de ce projet qu’elle a vu naître, « autour de la table d’un maire visionnaire », avec ses confrères. Une nouvelle idée de la transmission et du partage au cinéma.
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