Rencontre avec l’équipe de 5 septembre

Zinedine Soualem, Leonie Benesch, John Magaro et Marcus Rutherford dans 5 septembre de Tim Fehlbaum © 2024 Paramount Pictures

Distribué par Paramount ce 5 février, 5 septembre revient sur la prise d’otages aux JO de 1972 à Munich, à travers sa couverture par l’équipe de la télévision américaine ABC. Nous avons rencontré son réalisateur, Tim Fehlbaum, ainsi que deux de ses acteurs, John Magaro et Zinedine Soualem.

Tim Fehlbaum

D’où est venue l’envie de faire ce film ?

C’est en me renseignant sur cet événement que j’ai peu à peu pris conscience de son importance historique, et du tournant qu’il a joué dans l’histoire des médias. Par chance, nous avons rencontré Geoffrey Mason [le journaliste incarné par John Magaro, ndlr.] qui nous a raconté comment l’équipe d’ABC était passée en quelques heures d’une couverture de la septième médaille d’or du nageur américain Mark Spitz à une prise d’otages qui se déroulait juste à côté de leur studio. Nous avons également discuté avec d’autres protagonistes que l’on voit dans le film, et consulté les archives d’ABC Sports, qui étaient primordiales pour comprendre un peu mieux ce moment.

Quelle est la principale difficulté quand on s’attache à la reconstitution d’un tel événement qui a plus de 50 ans, mais reste très sensible ?

Parler de cet épisode ne peut se faire qu’avec beaucoup de respect. Nous avions donc une responsabilité qui nous obligeait à trouver un équilibre entre la fidélité aux faits, et le besoin de faire un film de fiction de 90 minutes. En l’occurrence, nous avons dû condenser certains moments et rassembler plusieurs personnages en un seul.

Vous accordez une grande part à la reconstitution d’époque, notamment en montrant toutes les contraintes que pouvait connaître une équipe de télévision dans les années 1970. Pourquoi avoir décidé d’ancrer à ce point ce film dans son temps ?

J’ai toujours été fasciné par la machinerie que représente la télévision, et particulièrement sa période analogique. Montrer de façon authentique comment les personnages interagissent avec tous ces outils permet de souligner, aussi, comment la retransmission télévisuelle de cette prise d’otages a changé la manière dont la technologie influence le monde et notre regard [l’événement ayant été suivi en direct par 900 millions de téléspectateurs, ndlr.].

Tim Fehlbaum sur le tournage de 5 septembre © 2024 Paramount Pictures

John Magaro

Votre personnage est tiraillé entre la morale et la volonté d’avoir la primauté de l’information. Comment l’avez-vous construit ?

J’ai beaucoup parlé avec Geoffrey Mason pour avoir son ressenti de l’événement, et j’ai passé deux mois dans des régies sportives afin de comprendre les problématiques de ce métier. Mais il y a eu assez peu d’apport de ma part, tout était déjà dans le scénario ; c’est justement ce conflit intérieur qui m’a attiré vers ce personnage. 

Vous êtes un acteur récurrent du cinéma indépendant américain – on a notamment pu vous voir dans First Cow de Kelly Reichardt, Past Lives de Celine Song ou encore LaRoy de Shane Atkinson. Est-ce que ces films arrivent à trouver leur place au sein de l’écosystème cinématographique étatsunien ?

En effet, ce n’est pas une période facile. Depuis plusieurs années, de plus en plus de spectateurs préfèrent voir un blockbuster, plutôt que prendre le risque de visionner un film indépendant. Mais on trouve régulièrement des œuvres qui tirent leur épingle du jeu aux États-Unis comme dans d’autres pays, comme ce qui s’est passé avec Past Lives. C’est assez rare, mais c’est réconfortant de voir un film comme celui de Celine Song, très art et essai, avec des acteurs très peu connus, qui brise le plafond de verre et captive autant de personnes à travers le monde. Et d’ailleurs, on voit plusieurs cinéastes indépendants qui, après un succès, réalisent un gros film. Ces passages sont très intéressants, et me font dire que le cinéma indépendant aura toujours sa place aux États-Unis.

À un peu plus d’un an des grèves hollywoodiennes, est-ce que vous remarquez un avant et un après ?

C’est encore difficile à dire. Le secteur du cinéma a pris beaucoup de coups ces dernières années, entre la pandémie, les grèves, et maintenant les incendies à Los Angeles. Il était nécessaire de se battre pour nos droits, notamment face à la montée de l’IA, et je suis optimiste quant à l’issue de ces manifestations, et leur impact dans le futur.

John Magaro sur le tournage de 5 septembre © 2024 Paramount Pictures

Zinedine Soualem

Comment êtes-vous arrivé à participer à ce tournage ?

J’ai reçu l’information de la part de mon agent, Laurent Grégoire de l’agence Adéquat, et je devais faire une self-tape [vidéo faite soi-même pour un casting, ndlr.] en anglais. Il n’y avait pas beaucoup de texte, ce qui m’arrangeait au vu de mon niveau d’anglais, et après avoir envoyé la vidéo j’ai rencontré Tim en visio. On a refait un autre essai en direct, et j’ai été pris pour le rôle. Heureusement, j’incarne un Français qui n’a pas à faire de longues tirades shakespeariennes !

Et justement, vous avez eu assez peu de projets internationaux dans votre carrière, pourtant longue de plusieurs décennies. Qu’est-ce qui était différent avec 5 septembre ?

Pas grand chose honnêtement, si ce n’est que d’ordinaire, quand j’arrive sur un projet, je connais toujours au moins deux-trois techniciens ou comédiens. Là, tout le monde m’était inconnu, mais ce n’était pas effrayant, bien au contraire. Le tournage a duré deux mois, et j’étais toujours au studio, même les jours où je ne tournais pas, car j’étais curieux de voir ce qui s’y passait. Et puis, j’aimais bien la manière dont Tim nous faisait travailler. Il y avait peu de répétitions, mais beaucoup de prises et reprises, et quand il avait ce qu’il voulait, il nous laissait faire une prise “freestyle”.

Avec le temps, avez-vous développé un lien particulier avec les cinémas français ?

Oui, au fur et à mesure des films et des tournées, il y a des têtes et des lieux qui nous deviennent familiers, même si je suis toujours un peu triste de voir que ma région d’origine, l’Auvergne, est toujours oubliée ! Mais c’est très important d’entretenir ce lien avec les exploitants, ce sont eux qui font une grande partie du travail pour faire venir le public.

Zinedine Soualem, Leonie Benesch, John Magaro et Marcus Rutherford dans 5 septembre de Tim Fehlbaum © 2024 Paramount Pictures

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