Les deux cinémas art et essai stéphanois ont achevé en septembre des travaux entrepris au printemps 2019. Déco, accessibilité, rétrofit… et de nouveaux espaces dédiés à l’animation, pour des salles historiques particulièrement tournées vers la jeunesse.
Le 23 octobre, à l’occasion de la sortie de son film La Petite Dernière, Hafsia Herzi est venue inaugurer ce qui est aussi “la petite dernière” du Méliès Saint-François : un espace de médiation qui vient d’être aménagé dans le cinéma. « Dans ce quartier populaire du centre de Saint-Étienne, où quasiment rien n’est ouvert le soir, il est très important d’avoir un lieu de discussion convivial, avec un bar », souligne Paul-Marie Claret, le gérant des deux Méliès. Le choix de l’actrice-réalisatrice était une évidence pour le directeur-programmateur Sylvain Pichon, « pour ce qu’elle représente, tant dans sa personnalité, son expérience, mais aussi sa jeunesse et ses origines, qui ont beaucoup de sens dans une ville comme Saint-Étienne ». Cet espace Hafsia Herzi, équipé d’un vidéo projecteur et qui pourra accueillir des ateliers et associations, a été achevé lors de la deuxième tranche de travaux lancés en 2024 au Méliès Saint-François, et, tout comme le rétrofit laser de la grande salle, achevés fin août dernier, juste à temps pour accueillir les dernières Rencontres Jeune public de l’Afcae à la rentrée [voir Boxoffice Pro du 22 septembre].
Travaux au Méliès Saint-François…
Cet établissement, ouvert en 1928, compte deux salles de 122 et 358 places, dont la plus grande, avec balcon, est la plus ancienne de Saint-Étienne encore en activité. Autrefois nommé Le France et rebaptisé Méliès Saint-François en 2014, quand Paul-Marie Claret le reprend, l’historique cinéma de quartier est donc aujourd’hui tout neuf. La première période de chantier a permis de changer la quasi-totalité des fauteuils, moquettes et éclairage, et s’est donc poursuivie par la transformation de tous les espaces d’accueil. Le passage sous la verrière a été équipé de banquettes et tables basses, et conduit désormais du hall à l’espace modulable Hafsia Herzi. Sans oublier l’accessibilité totale aux PMR – dont des sanitaires immenses. L’esthétique de l’ensemble est due aux architectes Clémence Boyer et Philippine Lemaire, « qui avaient déjà participé à la rénovation du Jean-Jaurès dans le même esprit art déco, et qui vont travailler par ailleurs sur la rénovation du Diagonal de Montpellier », précise Paul-Marie Claret. Au total, sa société a financé les travaux à hauteur de 420 000 €, alors qu’elle n’est que locataire des murs, propriétés de la Ville de Saint-Étienne qui, de son côté, a investi environ 50 000 €.

… après ceux du Méliès Jean-Jaurès
À 15 minutes à pied, le Méliès Jean-Jaurès est le seul cinéma de l’hyper-centre, et déploie ses 4 salles et sa somptueuse brasserie dans un bâtiment Art nouveau sur cinq étages, emblématique de l’architecture stéphanoise. Totalement accessible avec ses deux ascenseurs installés il y a près de 20 ans, le Jean-Jaurès, lui, a été rénové en 2019… à la veille du Covid. « L’axe fort de cette rénovation a été celle de la façade, et si la structure n’a pas été modifiée, tous les espaces ont alors été repensés », relate Paul-Marie. Les mêmes architectes ont travaillé sur la brasserie, ouverte cette année-là – gérée par une société différente mais à laquelle celle du Méliès est associée. « Car si ce n’est pas la même économie, c’est la même enseigne : le Méliès rayonne sur toute la place et l’a fortement redynamisée », souligne Sylvain Pichon, précisant que depuis, six nouveaux restaurants ont ouvert tout autour. Si la transition laser des projecteurs reste à finir, six ans auront donc été nécessaires pour mener l’ensemble des travaux entre les deux cinémas, pour un peu plus de 1,2 million d’euros investis par la société de Paul-Marie Claret. « Nos travaux restent difficiles à amortir, mais les deux Méliès sont le pôle d’attraction de chacun de leur quartier », confirme le gérant. Et un acteur culturel incontournable pour toute la ville.
Une institution pour toutes les générations
Avec sa programmation à 93 % art et essai, face à 20 écrans Megarama au centre Saint-Étienne, les deux Méliès se définissent comme une “épicerie fine en cinéma”, et ce pour tous les publics. Dans leur Gazette tirée à 20 000 exemplaires, on retrouve tous les mois les “Cerises sur le gâteau”, pour mettre en avant les films Recherche indépendamment de leur sortie nationale, les “Méliès cultes” ou “Le film du mois”, mais aussi l’annonce des soirées “Pochette surprise”… qui existaient bien avant les coup de coeur surprise de l’Afcae. « De même que les théâtres font des présentations de saison, chaque mois nous montrons 1 heure de films-annonces puis un film surprise, autour d’un verre, avec des partenaires locaux tels que brasseurs ou agriculteurs. Mais c’est surtout l’occasion d’une discussion entre l’équipe et les spectateurs. » Des T-shirts et goodies à l’effigie des Méliès, ou encore des battle initiées pendant le confinement contribuent aussi à fidéliser toutes les générations. Et si les Méliès s’illustrent par leur travail historique avec le jeune public, ils ont surtout été pionniers en lançant, dès 2012, des jeunes ambassadeurs. Attentifs à tous les publics, ils ont mis en place des tickets suspendus dès 2014, proposent un tarif solidaire pour les bénéficiaires du RSA ou encore un tarif “happy hour”. « L’idée est que l’argent ne soit pas un frein pour aller au cinéma, en nous adaptant aux évolutions de la société », explique Sylvain Pichon. Cela passe aussi par une adaptation des horaires, « quitte à réduire le nombre de séances pour les optimiser », ajoute Paul-Marie Claret. « Notre stratégie fonctionne, nos relations avec les distributeurs indépendants sont bonnes et nos travaux ont conforté notre place d’institution très connue à Saint-Étienne. »
En 2024, les deux Méliès ont enregistré 176 000 entrées sur les 6 salles – 134 000 au Jean-Jaurès et 42 000 au Saint-François malgré les travaux –, sans compter les quelque 5 000 spectateurs des soirées à prix libres, autour de débats de société. « Un tiers de nos entrées viennent des moins de 25 ans, dont la moitié environ sur des séances scolaires », précise Paul-Marie Claret. Samedi dernier au Saint-François, une séance tout public a rassemblé les familles du quartier autour du Secret des mésanges. Ils étaient 171 dans la salle, et bien serrés autour du bar Hafsia Herzi !


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