Les films américains dominent-ils plus qu’avant le box-office français ?

À la veille de la Fête du Cinéma, Comscore publie le bilan de la fréquentation du premier semestre 2022. Contre toute attente, les indicateurs contrecarrent l’hypothèse d’un marché à deux vitesses et d’une domination apparente des films américains.

Avec 75 millions de spectateurs sur le premier semestre, le marché français, équivalent aux trois quarts de son niveau pré-pandémie, fait preuve d’un socle solide. Et ce malgré un contexte chaotique, dont un début d’année sous le signe d’Omicron. Autre difficulté mise en évidence par Comscore, l’augmentation du prix des places en 2021, liée aux désabonnements des cinéphiles “encartés” et à la premiumisation des séances. Ce à quoi s’ajoute le constat d’un plafond de verre à 4 millions d’entrées par semaine, qui n’a été dépassé que cinq fois depuis mai 2021, dont une seule en 2022 (fin février), alors que pendant les périodes de petites vacances scolaires en 2018 et 2019, la fréquentation atteignait les 6 millions hebdomadaires.

Le classement des films est, de toute évidence, dominé par les productions américaines, qui trustent le podium. Les sept films qui ont réalisé plus de 3 millions d’entrées depuis un an sont également tous hollywoodiens. En 2022, Maison de retraite et Qu’est ce qu’on a tous fait au Bon Dieu, respectivement en 10e et 7e position, sont les deux seuls français du top 10. Sur le premier semestre 2018, les deux premières places étaient justement occupées par des productions hexagonales, Les Tuche et La Ch’tite Famille, suivi de Taxi 5 et Tout le monde debout (4e et 10e position).

En parallèle, Comscore constate que s’il y a une tendance à la concentration sur les films leaders, celle-ci ne date pas de la crise mais se renforce depuis 2016. En 2021, les 50 premiers films du box-office ont réalisé 70 % de part de marché, contre moins de 60 % en 2016. De même, en 2021 moins de 25 films nourrissaient 50 % la fréquentation annuelle, contre 40 films en 2013. Par ailleurs, la part de marché hebdomadaire des films leaders « impose de nuancer cette évidence, car elle a tendance à retrouver en 2022 les niveaux des années pré-pandémie », et ce, que ce soit sur une moyenne des 52 ou des 12 dernières semaines.

Enfin, la société d’analyse contredit l’idée d’une domination extrême des films américains au premier semestre 2022, démontrant que leur part de marché et celle des films français retrouvent leur niveau pré-Covid. En effet, en 2018, les titres américains représentaient environ 48 % du marché vs 43 % en 2022, tandis que les films français affichent 36 % en 2022.

En conclusion, si le marché n’est pas plus concentré qu’auparavant concernant la répartition par nationalité, les films américains étant moins nombreux ont davantage performé et, a contrario, l’offre pléthorique de films français a permis de maintenir son niveau d’entrées sur le volume total, avec l’effet pervers d’une moindre performance individuelle et un effet de cannibalisation. « Ce constat pose la question de la performance de nos blockbusters français et du renouvellement des œuvres. Le monde a tellement évolué que les codes narratifs ont changé. Un temps d’adaptation de la création est nécessaire », commente Éric Marti, directeur général de Comscore, ajoutant suivre de très près les tendance des films art et essai qui voient leur part de marché baisser de 2,3 % vs 2018 et de 5 % vs 2019. Difficile néanmoins de définir une tendance pour le second semestre de l’année qu’Eric Marti espère, sans événement inattendu, à un niveau de 160 millions de spectateurs.

Les News