À la veille des élections, l’association Passeurs d’images et la FNCF ont convié les représentants des candidats à la présidentielle. Quelles propositions et convictions portent les candidats autour des enjeux de l’éducation à l’image ? Réponses ce matin aux 7 Parnassiens lors d’un débat animé.
« L’éducation aux cinémas et aux images, un enjeu citoyen pour demain » ; tel était le thème du débat animé par Julien Marcel, directeur général de The Boxoffice Company. Cinq représentants des candidats ont répondu présent à l’invitation envoyée à l’ensemble des prétendants à la présidentielle. Coline Bouret représentait le candidat de la France insoumise Jean-Luc Mélenchon ; Jean-Marc Dumontet, Emmanuel Macron pour La République en marche ; Pierre-Yves Jourdain parlait pour le candidat du Pôle écologiste Yannick Jadot ; Laure Darcos, pour Valérie Pécresse du parti Les républicains et Sylvie Robert pour la candidate du Parti socialiste Anne Hidalgo.
Réinvestir et renforcer l’éducation culturelle et artistique
« L’éducation à l’image est indispensable à la démocratisation culturelle et à l’égalité des chances », a introduit Richard Patry, président de la FNCF. En effet, si trois millions de scolaires ont accès aux dispositifs nationaux d’éducation à l’image, comment toucher les neuf millions restants ? Pour Coline Bouret (France insoumise), « l’éducation artistique et culturelle doit se faire tout au long de la vie, de l’enfance à la vie professionnelle ». Trois propositions à la clé : réinvestir les budgets dans l’éducation artistique, recruter plus de médiateurs culturels et jumeler les écoles avec plusieurs lieux culturels.
Pour Pierre-Yves Jourdain (Pôle écologiste), l’objectif est simple : « Il faut que chaque classe puisse, au moins une fois dans l’année, assister à une séance du dispositif ; c’est aussi une question de citoyenneté ». Pour ce producteur de cinéma, deux autres aspects de l’éducation aux images sont primordiaux : le respect de la création et des auteurs, et la prévention des jeunes exposés à des images inappropriées.
Constat partagé par Sylvie Robert (PS), pour laquelle « aider les jeunes à décrypter le monde devient une question politique». À ce titre, il est nécessaire de leur donner l’habitude de fréquenter les lieux culturels et en particulier les cinémas de proximité. « Il faut actionner tous les leviers possibles », insiste la sénatrice, « mais encore faut-il que le système scolaire permette de le faire ».
Pour Jean-Marc Dumontet (LREM), le sujet va au-delà. « Il faut embrasser la Culture, il faut une mobilisation générale. » Le producteur de spectacles appelle à l’action, en précisant que l’enjeu crucial de la formation des enseignants reste du ressort de l’Éducation nationale, émettant l’idée d’une demi-journée par semaine dédiée à la culture au sein des programmes scolaires.
Laure Darcos (LR) pense au contraire que c’est aux Drac de jouer ce rôle au travers de référents culturels pour éviter une action trop ponctuelle. Autre opportunité pour la sénatrice et conseillère départementale : l’initiation des jeunes à l’image ouvre bien des perspectives de métiers, surtout avec l’avènement du numérique. « C’est un bassin d’emploi extraordinaire ! Nous avons des formations incroyables à proposer à nos enfants. »
Quant à la question du budget pour permettre ces mutations, Coline Bouret avance la proposition de Mélenchon de consacrer 1 % du PIB à la Culture, soit 1,2 milliard d’euros de plus que le budget actuel. Bien que les autres représentants n’aient pas avancé de chiffres, Pierre-Yves Jourdain rappelle que les sommes qui avaient été ponctionnées au CNC par le gouvernement devraient être rendues. Enfin, Laure Darcos propose de réattribuer les 350 millions d’euros dédiés au pass Culture.
La création en proie au piratage
Le respect des œuvres et de leurs créateurs reste une préoccupation pour tous les représentants de candidats présents, pour lesquels la sensibilisation et la sanction deviennent indispensables. Sylvie Robert reconnaît que l’éducation à l’image et au cinéma repose aussi sur ce point afin « de faire entrer dans l’esprit des jeunes générations que rien n’est gratuit, que derrière une œuvre il y a un auteur et qu’il doit être rémunéré. Sinon c’est du pillage ! »
Pour Laure Darcos, le signalement ne suffit plus et « la sanction pénale est obligatoire ». Un constat plutôt partagé par l’ensemble des invités même si Pierre-Yves Jourdain considère qu’il faut davantage se focaliser sur les sites de piratage et renforcer « les solutions techniques afin de bloquer ces sociétés qui brassent beaucoup d’argent ». Coline Bouret confirme qu’il faut mieux lutter contre les sites qui mettent en ligne les contenus plutôt que de faire « la chasse à l’étudiant qui n’a pas les moyens ». D’autre part, elle estime que le travail de l’art n’est pas assez reconnu, « Il faut assurer une rémunération juste et un accès à l’ensemble des droits sociaux aux auteurs ».
Le pass Culture, et après ?
Encore en évolution, le pass Culture reste au centre des débats. Pour Sylvie Robert, le dispositif lancé en 2019, désormais accessible à partir de 15 ans, coûte cher. « Il faut donc le réorienter en le mettant à disposition dès la sixième et en faisant de lui un véritable outil éducatif », accompagnant le jeune jusqu’à ses 18 ans. Pour Jean-Marc Dumontet, cet outil est « totalement révolutionnaire. Comme toute innovation forte, il a nécessité des ajustements » mais favorise la sensibilisation de populations qui n’avaient pas accès à la culture. À l’inverse, Coline Bouret dénonce un « usage très individuel du pass Culture » et propose de réorienter son budget pour financer, par exemple, les sorties scolaires pour les familles qui n’en n’auraient pas les moyens ou une allocation systématique pour les étudiants.
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