Le cinéma marnais souffle ce vendredi ses 100 bougies, près d’un an après sa transformation en un établissement moderne de sept écrans.
31 janvier 1920. Épernay, à l’image du reste du pays, panse encore les plaies causées par la Première Guerre mondiale. Mais une joyeuse nouvelle va venir apporter un peu de baume au cœur des habitants encore sous le choc. Sur un boulevard de la Motte en effervescence se dévoile le Palace, salle de plus de 1 300 fauteuils agencée dans une ancienne maison bourgeoise. « L’un des plus beaux cinémas de France » écrira même Le Réveil de la Marne à l’époque. Et le deuxième de la cité sparnacienne, après l’ancienne salle des fêtes devenue l’Omnia-Pathé puis le Tivoli-Cinéma. Éclairage des allées, suppression du couloir et de l’escalier, ouverture de dix portes de plain-pied assurant une évacuation rapide, installation de la cabine à l’extérieur de la salle : autant d’éléments dotant l’établissement de « l’organisation la plus moderne de l’heure actuelle », relatait le journal.
Favorisant surtout les films français, le Palace va quelque peu diversifier sa programmation au cours des années 1930, raconte l’historien local Pierre Guy dans son ouvrage Le Palace Épernay, un siècle de cinéma. Sous la houlette de son directeur Henri Ténégal, l’établissement est alors loué à des associations et des comités, puis s’ouvre aux opérettes et autres attractions au début des années 1940. En parallèle, la cité sparnacienne se dote, pour peu de temps, de deux nouvelles salles : le Rex et la Cité, ancienne salle de patronage. Réquisitionné pendant la guerre, le cinéma poursuit ensuite ses activités dans sa configuration initiale avant de subir une transformation à la fin des années 1970. D’un mono-écran, le Palace passe à quatre écrans, permettant de gonfler la fréquentation autour des 80 000 spectateurs.
À la veille du changement de millénaire, le cinéma change de propriétaire : la famille Ténégal passe en effet la main à la société Image et Son de Patrick Brouiller. Sous sa direction, le Palace poursuit son développement et s’agrandit, en 2001, avec l’achat d’un bâtiment annexe, passant de quatre à six salles pour une capacité avoisinant les 1 100 places. Résultat : quelque 150 000 cinéphiles se pressent chaque année dans ce lieu classé art et essai.
« Le nombre croissant de spectateurs, l’équipement vieillissant et les nouvelles normes d’accessibilité nous ont poussé à envisager la rénovation du Palace », explique le directeur Daniel Castaner. Confié à l’architecte Gilbert Long, le projet devait initialement démarrer ses travaux en juillet 2017 avec une fermeture partielle du cinéma. Retardé par des études complémentaires, il est finalement lancé en avril 2018 avec une fermeture totale au public. Après la démolition des plus vieux bâtiments, la façade est entièrement repensée pour s’inscrire dans l’héritage du territoire, avec un aspect minéral rappelant la vigne et un maillage métallique évoquant les bulles de champagne, dans des tons ocre et anthracite.
L’intérieur a également été repensé, avec un hall plus spacieux et l’intégration d’un espace d’exposition. Trois salles ont ouvert en janvier 2019, deux à la fin de l’hiver puis les dernières à l’approche de l’été dernier. Dans sa nouvelle configuration, au budget de 5,2 millions d’euros, le Palace possède une salle avec projecteur laser 4K et deux avec son immersif DTS-X. « Cet équipement nous permet d’accueillir beaucoup de projections techniques, raconte Daniel Castaner. Par exemple, le mixeur de Luc Besson était venu tester Anna quelques semaines avant sa sortie. » Avec 155 000 spectateurs accueillis l’an passé malgré une ouverture partielle en début d’année, le cinéma peut logiquement lorgner la barre symbolique des 200 000 entrées. Le cadeau d’anniversaire idéal ?
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