Depuis novembre, le nouveau vaisseau de la SCOP Le Navire vogue sur les flots de la cinéphilie ardéchoise. Retour avec le gérant Christophe Maffi sur l’aventure du cinéma d’Aubenas, qui regroupe désormais ses 6 salles sous le même toit… et bien plus !
Il y a 33 ans, sous l’impulsion de Jacques Daumas et Jean Haffner, naissait Le Navire, avec pour ambition d’implanter de l’Art & Essai dans la petite ville d’Ardèche du Sud. « C’était un projet inscrit dans la volonté des néo-ruraux, qui importaient leurs habitudes citadines et leur envie de culture avec eux, et l’un des premiers projets soutenus par l’ADRC, qui à l’époque venait juste d’être créée », rappelle Christophe Maffi. Les deux salles art et essai d’Aubenas ouvrent donc, en novembre 1984, avec une ligne éditoriale complètement novatrice pour une ville de province de 12 000 habitants (20 000 avec le bassin), face au Palace, le cinéma commercial historique de 4 salles généralistes.
Au fil du réseau
Les années suivantes, la flotte du Navire ne cesse de se développer dans la région Auvergne-Rhône-Alpes : une première salle en délégation de service public à Saint-Paul-Trois-Châteaux (qu’ils garderont 20 ans), Le Navire de Valence (racheté à Utopia), L’Eden à Crest et Le Cinéma à Pierrelatte (exploité en DSP depuis 2003). Pendant ce temps, au passage à l’an 2000, le réseau relève le défi du rachat du Palace d’Aubenas. Christophe Maffi, salarié de la société à l’époque, se souvient : « Pour nous ce rachat était comme une consécration, une vraie victoire, à contre-courant des marqueurs habituels : c’était le petit cinéma qui rachetait le gros ! »
Autre marqueur fort de l’histoire du Navire : la transformation en 2006 de la SARL en SCOP*, sous l’impulsion des anciens gérants, pour qu’au moment du passage de main, la société reste entre celles de ses salariés. « Ils ne vendaient pas leurs parts aux plus offrants, mais aux associés de la coopérative. » Depuis, en plus de ses activités “salles”, la société coopérative a aussi développé une branche de prestation itinérante, avec, lors des pics estivaux, trois équipes qui tournent pour assurer une centaine de projections, de Cannes à Lyon. Il y a une huitaine d’années, face à l’impossibilité d’effectuer les aménagements d’accessibilité requis au Navire d’Aubenas, la SCOP décide de transformer la contrainte en opportunité pour lancer un nouveau projet de cinéma. « Or, nous n’avions aucune idée de l’endroit où nous allions pouvoir le réaliser, et n’étant pas en capacité financière d’acheter un terrain en centre-ville, nous pensions être condamnés à la périphérie. » C’est alors que la Mairie d’Aubenas, sollicitée par le Navire, propose d’utiliser le terrain d’un ancien garage qu’elle venait d’acquérir. « La parcelle a été mise à notre disposition sous forme d’un bail emphytéotique, avec une condition : réaliser un parking avec le cinéma. »
Des roues dans les idées
Le Navire qui occupe la totalité des 3 000 m² du terrain alloué par la Ville, peut s’enorgueillir d’être le premier cinéma de France accueillant un parking sur son toit. Soit 80 places payantes, mises à disposition de la commune, avec bien entendu un tarif privilégié pour les spectateurs. En ce qui concerne l’aménagement intérieur, l’idée de créer 7 salles – comme le numéro du département – est rapidement abandonnée : « Cette 7e salle se serait faite au détriment du confort (rangs plus serrés, écrans plus petits pour gagner un peu d’espace). Nous avons choisi de rester sur 6, comme dans la configuration actuelle entre les 4 salles du Palace et les 2 de l’ancien Navire, mais nous gagnons en capacité d’accueil (passant d’un total de 700 à 900 fauteuils) et en taille d’écran (15 mètres de base pour celui de la grande salle de 300 places, son Atmos, espace de 1m20 entre les rangées). » L’ensemble des travaux a été financé à travers un “montage classique” constitué de fonds propres et d’un emprunt important (sur 20 ans !), complété par les financements du CNC, de la Région Auvergne-Rhône-Alpes et de la ville d’Aubenas.
En matière de programmation, le nouveau site va permettre de mixer celle, grand public du Palace et l’art et essai de l’ancien Navire. Le “nouveau” Navire table sur une fréquentation entre 150 et 160 000 entrées annuelles.
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