La Quinzaine en salle débute ce mercredi 5 juin dans une trentaine de cinémas, pour 10 jours d’avant-premières des films de la Quinzaine des Cinéastes 2024. Retour, en compagnie du délégué général Julien Rejl, sur l’identité de la section parallèle cannoise dont il assure la direction artistique depuis l’été 2022, et ses expérimentations pour que les films de sa sélection s’épanouissent, bien au-delà de la bulle festivalière.
[Entretien réalisé en amont de la Quinzaine des Cinéastes 2024, et article d’origine paru dans le magazine Boxoffice Pro du 18 mai 2024]
L’art et l’équilibre d’une sélection
Le délégué général a conscience que la section créée par la Société des réalisatrices et réalisateurs de films comme contre-programmation du Festival de Cannes est, aujourd’hui, elle-même devenue « institution ». Pendant ce temps, côté Sélection officielle du Festival, Cannes Première accueille désormais des auteurs plus identifiés, permettant à Un Certain Regard de renforcer son rôle de “découverte” avec des choix « plus osés, comme ceux de la Semaine de la Critique », souligne Julien Reijl en reconnaissant la concurrence. « Il y a, et c’est tout à fait naturel, un certain nombre de titres sur lesquels on se bat. » Mais hors de question pour le délégué général de la Quinzaine « d’hériter des films refusés par la Compétition. Nous sommes une sélection à part entière, avec des places tout aussi prestigieuses », estime le responsable qui prend régulièrement le pari de se positionner sur « des films qui sont soit moins “désirés” ailleurs, soit qui nous préfèrent, avec l’envie de faire partie de ce label et de cette communauté ».
En somme, des partis pris forts qui retrouvent « l’esprit original de la Quinzaine, avec sa convivialité et ses échanges », offrant une égalité des chances entre « les films qui sont déjà sur le marché et ceux qui ne sont pas du tout identifiés, qui nous arrivent par des canaux directs. Nous sommes là pour faire advenir des cinéastes, tout en restant toujours ouverts aux cinéastes renommés ! », précise Julien Rejl, confiant en le fait que les propositions de cinéma « qui se réinventent partout dans le monde permettront toujours d’explorer de nouveaux territoires ».
Reste à maintenir l’équilibre, à l’intérieur même de la sélection, entre les découvertes les plus radicales et les propositions plus populaires, « comme les films d’ouverture [Ma vie ma gueule de feu Sophie Fillières] et de clôture [Les Pistolets en plastique de Jean-Christophe Meurisse], ou encore l’animation Anzu, chat-fantôme de Yôko Kuno et Nobuhiro Yamashita, qui ont permis d’élargir la palette à tous les publics ».
Public, l’atout de choix
Car comme le rappelle son délégué général, la Quinzaine des Cinéastes est la seule sélection cannoise accessible sans accréditation, donc ouverte à tous, et où « les cinéastes montrent leurs films à un vrai public », notamment composé d’étudiants. Tout en valorisant cette participation unique, le “Choix du public” lancé cette année – et qui s’est porté sur Une langue universelle du Canadien Matthew Rankin – ambitionne, au-delà du rendez-vous cannois, d’offrir un soutien supplémentaire à la diffusion. Un label, à ne pas confondre avec un prix – la Quinzaine souhaitant préserver sa spécificité non compétitive –, destiné à agir comme « un signal pour les exploitants et les spectateurs art et essai, et aider peut-être le film à être plus vu ».
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« Faire Quinzaine » en salles
L’année dernière, sous l’impulsion de son nouveau délégué général, la section parallèle a développé de manière considérable son action de diffusion. « Le contexte a changé, rappelle l’ancien distributeur (qui a officié chez Capricci, de 2010 à 2020). Nous ne pouvons pas nous contenter de montrer des films audacieux en festival, alors que la cinéphilie et la curiosité pour ce type de films s’érodent en salles. Pour que l’essai soit transformé, la Quinzaine ne doit pas être un événement pour happy fews à Cannes. »
C’est ainsi qu’en juin dernier, 32 cinémas à travers la France ont rassemblé un total de 17 000 spectateurs autour du cru 2023 de la Quinzaine. Une performance d’autant plus encourageante qu’elle a été réalisée sur « une semaine généralement parmi les plus basses de l’année en termes de fréquentation ».
La deuxième édition commence aujourd’hui, toujours dans le même nombre de cinémas, mais avec un dispositif assoupli : « Il est possible de ne programmer que 8 ou 9 films d’une des deux listes de 10 films que nous proposons – tout comme de programmer des films de l’autre liste en plus. » Mais si l’ancien distributeur est pleinement conscient du besoin de laisser de la place à tous les films dans une programmation, il assume toutefois le fait que la Quinzaine en salle, qui se doit de proposer assez de titres « pour faire Quinzaine », ne convient pas forcément aux plus petites exploitations. « Avant de pouvoir travailler le reste du territoire en profondeur, asseyons déjà l’opération auprès du public des salles art et essai des grandes villes », argumente le délégué général, tout en soulignant la complexité de sa gestion logistique, coordonnée par une collaboratrice dédiée (Lucie Detrain). Un boulot de supervision « complètement fou », qui doit, en outre, avec le partenaire Cinego, tenir compte de la limitation (à 30 séances maximum) des visas exceptionnels sous lesquels sont exploités la quasi-totalité des films de la sélection. Mais au final, toutes les expérimentations servent bien la même ambition : celle de permettre aux salles de s’emparer de la Quinzaine et la partager avec leurs spectateurs.
Liste des cinémas accueillant la Quinzaine en salle :
Aix en Provence – Mazarin
Antony – Le Sélect
Auch – Ciné 32
Avignon – Utopia
Bordeaux – Utopia
Chambéry – Astrée
Cucuron – Le Cigalon
Grenoble – Le Club
Grenoble – Le Méliès
Hérouville St Clair – Café des images
Lille – UGC Métropole
Lyon – Comoedia
Marseille – Alhambra
Montpellier – Diagonal
Montreuil – Le Méliès
Nancy – Caméo
Nantes – Le Katorza
Nice – Belmondo
Nice – Cinéma Rialto
Nîmes – Le Sémaphore
Orléans – Les Carmes
Paris – Forum des images
Paris – mk2 Beaubourg
Paris – Reflet Médicis
Paris – Le Louxor
Poitiers – Le Dietrich
Rennes – Le TNB
Rouen – L’Omnia
Saint-Étienne – Le Méliès
Strasbourg – Le Star
Toulouse – L’American Cosmograph
Versailles – UGC Roxane
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