Le réalisateur iranien a été condamné à une peine de six mois de prison et cinq ans d’interdiction de tourner pour avoir montré Leïla et ses frères à Cannes. Le milieu du cinéma, notamment en France, exprime son indignation et son soutien au cinéaste.
[mis à jour le 17/08/23] Le cinéaste Saeed Roustaee, 34 ans, et son producteur Javad Norouzbeigui ont été condamnés à six mois de prison en Iran pour avoir présenté sans autorisation, au Festival de Cannes 2022, son film Leïla et ses frères, interdit dans son pays. Selon le quotidien local Etemad, le tribunal révolutionnaire de Téhéran accuse les deux hommes « d’avoir contribué à la propagande de l’opposition contre le pouvoir islamique ». Ils ne devraient purger qu’1/ 20ème de leur peine, soit environ neuf jours, le reste de la condamnation étant suspendu pour cinq ans. Mais pendant cette période, les accusés ne pourront plus travailler ni communiquer avec des professionnels du cinéma. Et l’on se souvient que son confrère Jafar Panahi avait de son côté vu sa liberté conditionnelle annulée à l’été 2022, alors qu’il s’inquiétait du sort d’un autre cinéaste emprisonné, Mohammad Rasoulof.
Pour rappel, Saeed Roustaee a été révélé en 2021 avec La Loi de Téhéran, sélectionné à Venise, puis lauréat du Grand Prix et Prix de la Critique au Festival du film policier de Reims et nommé au César du Meilleur film étranger. Leïla et ses frères est sorti en France l’année suivante – distribué par Wild Bunch pour près de 125 000 entrées – et montre le parcours d’une jeune femme qui entreprend de sortir sa famille des dettes qui l’accablent. En juillet dernier, Saeed Roustaee avait présidé le jury du Festival de Biarritz – Nouvelles Vagues.
Le Festival a d’ailleurs exprimé aujourd’hui sa « stupeur » en apprenant la condamnation de Saeed Roustaee. « Son seul crime : être un cinéaste libre ! », s’indigne l’équipe de Biarritz au sujet de celui qui est déjà « l’un des grands cinéastes internationaux ».
La SRF a aussi exprimé son soutien au cinéaste et sa consternation face à sa condamnation. « Nous considérons cette décision comme une atteinte à la liberté d’expression artistique et une violation des droits fondamentaux de l’individu », souligne dans son communiqué la Société des réalisatrices et réalisateurs de films. Les cinéastes de L’ARP réaffirment qu’il est « plus que jamais nécessaire de lutter pour qu’un cinéma fort, créatif et indépendant existe. Un cinéma qui puisse questionner nos sociétés sans que cela soit au péril de ceux qui le font, un cinéma qui puisse être matière à réflexion, un cinéma qui ouvre nos esprits ».
L’Association française des cinémas art et essai, qui a soutenu les deux longs de Saeed Roustaee lors de leur sortie en salle, « souhaite exprimer son inquiétude quant à cette injustice grave, qui constitue une atteinte directe aux droits de l’Homme ainsi qu’à la liberté d’expression artistique ». L’Afcae ajoute qu’une « mobilisation de la part de la communauté artistique internationale s’impose, afin que le destin de Saeed Roustaee ne reflète pas celui de ses confrères, Mohammad Rasoulof et Jafar Panahi, emprisonnés en raison de leur art et libérés après des mois de captivité et d’impossibilité de tourner ».
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