L’École nationale supérieure des métiers de l’image et du son reste, encore aujourd’hui, la seule à dispenser une formation continue au métier de directeur d’exploitation cinématographique (DEC), et évolue au gré des besoins de la profession.
Article paru dans le Boxoffice Pro du 4 décembre 2024.
Alors que les douze stagiaires de la troisième promo DEC viennent de soutenir leurs mémoires de fin d’études, la campagne de recrutement est lancée pour la prochaine session de 18 mois, qui débutera en juin 2025, sous la supervision d’Emmanuel Papillon. Le jeune retraité, qui a quitté la direction du Louxor de Paris en février dernier, intervenait déjà régulièrement à La Fémis et accompagnera donc la promo DEC 25 en tant que référent professionnel. Une fonction où il succède à Luc Engelibert, « qui, depuis trois ans, a structuré cet enseignement dense et unique, certifié Qualiopi et désormais devenu diplômant [équivalent d’un Master 2, ndlr.] ». Le chef de projet de la formation exploitation, Luigi Magri, a de son côté été rejoint depuis mai 2024 par Vincent Thabourey, précédemment délégué général des Écrans du Sud.
Des expertises en mutation
Programmation, compta, animation d’une séance… les blocs de compétences dans lesquels interviennent une cinquantaine de professionnels reprennent les fondamentaux du métier, mais se sont aussi enrichis au contact de la profession, dont la FNCF et les différents syndicats. « Nous avons ainsi repéré que la question du management était un point faible, et avons donc développé les modules consacrés aux ressources humaines, ainsi qu’à la responsabilité sociétale des entreprises (RSE), à la transition écologique ou encore à la lutte contre les violences et harcèlement sexistes et sexuels (VHSS) », explique Luigi Magri. Des initiatives que son acolyte Vincent Thabourey résume comme des « évolutions incontournables inspirées du terrain, comme de la société ».
Destinée aux professionnels « qui sont déjà en salles », la formation DEC de La Fémis attire assistants de direction, directeurs adjoints, programmateurs, « mais aussi des personnes en reconversion provenant d’autres secteurs de la filière, comme de la distribution et des festivals ». Les responsables pédagogiques sont, en l’occurrence, particulièrement attentifs à composer des groupes hétérogènes et complémentaires. « Au sein d’une même promo, se côtoient des représentants de grands circuits, des indépendants, de l’itinérance, de salles municipales ou associatives privées, mais aussi de tous les territoires », décrit Luigi Magri. De quoi tordre le coup à bien des « préjugés sur son voisin, et se découvrir beaucoup de points communs ». Et c’est bien là que réside, selon Emmanuel Papillon, une des plus grandes richesses de la formation DEC continue : « ouvrir le champ de l’expérience personnelle et s’interroger sur ses propres pratiques, et tout ceci, en constituant un solide réseau ».
Le tremplin du terrain
De fait, outre le voyage d’étude réalisé en compagnie de l’ADRC en mars (à Marseille en 2024, probablement à Bordeaux en 2025) à la rencontre des cinémas, Drac, collectivités territoriales et autres acteurs locaux, la formation propose aussi, en fin de parcours, un séjour au Congrès de Deauville. Les stagiaires peuvent assister aux habituelles table ronde et rencontre avec les pouvoirs publics, mais aussi, en fonction de leur établissement cinématographique d’origine, aux réunions de branches. « Mais surtout, nous les invitons à aller voir tous les stands de l’expo, souligne Luigi Magri, sachant que souvent, il s’agit d’une toute première expérience du Congrès pour nos stagiaires, qui ne sont pas encore responsables d’établissement ». Responsables, ils promettent d’ailleurs de le devenir rapidement, avec « 77 % de personnes passées directeurs ou directrices au terme de six ans ».
La formation mène vers d’autant plus de responsabilités que, comme le souligne Emmanuel Papillon, « elle répond à une évolution personnelle ou une évolution de la structure, avec un projet, comme une ouverture prochaine de site ». En l’occurrence, le soutien de l’employeur est incontournable pour être sélectionné à ce parcours qui implique beaucoup d’engagement, dont 3 à 4 jours de présence mensuelle dans les locaux parisiens de La Fémis (hormis les lundis, déjà très chargés pour les professionnels de l’exploitation). Et si, chaque année, 95 % des stagiaires obtiennent le diplôme, les restants – qui n’ont pas pu aller au bout de leur mémoire pour des raisons légitimes – obtiennent l’intégralité des certifications.
Une autre particularité de la formation réside d’ailleurs dans son offre personnalisée de certifications, via un un parcours sur mesure, complétable en deux ans. Aux douze stagiaires de la formation intégrale sont ainsi régulièrement associés quatre à cinq stagiaires venus travailler un bloc de compétences précis, les autres blocs « déjà maîtrisés » pouvant être validés par acquis d’expérience (VAE). Sur le total de 23 stagiaires de la dernière promo, onze suivaient des parcours personnalisés. Encore une manière d’enrichir le groupe… et le réseau.
Les candidatures à la promo DEC 2026 sont ouvertes !
Mémoires de fin d’étude, des ressources pour toute la profession
Objets hybrides entre travail universitaire, réflexion professionnelle et parcours personnel, les recherches qui finalisent la formation continue de direction d’exploitation cinématographique constituent, au fil des années, un précieux corpus. Des questions sociales à l’architecture, en passant par l’écologie et le parcours spectateur, La Fémis dispose aujourd’hui d’une base d’environ 200 mémoires consacrés à la salle de cinéma, qui peuvent être mis à la disposition des autres professionnels du secteur.
À titre d’exemples, voici celles délivrés par la promotion DEC 2024, qui ont été soutenus devant un jury composé de Vanessa Ode (CGR Cinémas), Elise Mignot (Café des images), Luigi Magri et Luc Engelibert :
– “Animations dans les salles art et essai, le rôle des prestataires extérieurs”, par Fanny Poly
– “Le rapport des salles de cinéma aux réseaux sociaux”, par Tristan Bonis
– “La place des salles de cinéma indépendantes dans notre cinéphilie, à l’ère numérique”, par Clément Papot
– “L’accompagnement des pratiques amatrices de cinéma par les salles publiques et associatives”, par Caroline Moity
– “Les médiatrices et médiateurs en salle de cinéma : symptôme ou remède des mutations à l’œuvre dans l’exploitation cinématographique ?”, par Pauline Berra
– “Programmer après #MeToo”, par Sonia Tissier
– “Étudiants au cinéma : En quoi ces actions permettent le retour du public jeune en salles art et essai ?”, par Elise Dubreuil
– “La place de la clientèle BtoB pour les salles de cinéma”, par Alice Landrieu
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