Selon des rapports exclusifs publiés dans Variety et The Wall Street Journal le 27 septembre dernier, les films produits par Apple auront droit à une sortie au cinéma de plusieurs semaines aux États-Unis avant d’être diffusés sur la plateforme de streaming Apple TV+. Cette stratégie n’a pas été, pour l’instant, officiellement confirmée par Apple.
Le Wall Street Journal, citant des personnes anonymes « connaissant bien les plans de la société », rapporte qu’Apple a récemment été en négociation avec des grands circuits américains. Sa décision d’opter pour une sortie en salles s’inscrirait dans une volonté de rendre Apple plus attrayant pour les grands talents hollywoodiens, tout en évitant des confrontations avec les acteurs majeurs de l’industrie. En effet, J.J. Abrams a récemment refusé de signer un contrat avec le géant de la tech, préférant un partenariat financièrement plus modeste avec Warner Media en partie à cause du modèle de distribution d’Apple. Il s’agirait donc d’une stratégie renforçant le prestige et la légitimité de la plateforme, grâce à la construction d’une marque pro-exploitation suivant le modèle d’Amazon.
D’après le média américain, ces efforts seront dirigés par Zack Van Amburg et Jamie Erlicht, co-directeurs de la programmation vidéo chez Apple TV+. Apple pourrait aussi compter sur l’expertise de Greg Foster, ex-directeur chez IMAX Corp., qui semblerait être attaché au projet en tant que consultant, apportant avec lui plus de 20 ans de contacts dans l’industrie.
Quelques heures après la parution de l’article dans le Wall Street Journal, Variety mentionnait les trois premiers films originaux qui pourraient marquer l’entrée d’Apple dans les salles. Dans les cinémas des grandes villes américaines à partir du 18 octobre, le documentaire animalier The Elephant Queen migrera sur Apple TV+ le 1er novembre. Le film sera distribué par A24, avec lequel Apple a signé un accord pour cinq films dont le drame familial On the Rocks de Sofia Coppola, avec Bill Murray et Rashida Jones, qui bénéficiera d’une fenêtre exclusive traditionnelle. The Banker d’Anthony Mackie, avec Mackie et Samuel L. Jackson dans le rôle d’agents immobiliers et magnats financiers à l’ère de la ségrégation raciale, sortira le 6 décembre avec Bleecker Street avant d’être disponible sur la plateforme en janvier. Enfin, Hala, un favori de Sundance mettant en scène une jeune fille musulmane essayant de concilier ses traditions familiales avec les exigences de sa vie au lycée, sera diffusé dans les salles le 22 novembre par Greenwich Entertainment, puis disponible en décembre sur la plateforme.
Suivant une stratégie adoptée par d’autres sociétés de production aussi bien « classiques » que « tech », Apple s’appuiera (du moins dans un premier temps) sur des distributeurs indépendants pour porter ses films au cinéma. Annapurna avait ainsi collaboré avec A24 pour Spring Breakers (2013) et 20th Century Women (2016), distribués en France par Mars Films ; Amazon avait également suivi cette méthode, en partenariat avec Roadside Attractions, Bleecker Street et Lionsgate. Manchester By the Sea (2016), rapportant à Amazon son premier Oscar, avait ainsi été distribué par Roadside Attractions aux États-Unis et Universal en France, avec une fenêtre d’exploitation exclusive traditionnelle dans les deux cas. Les films de Woody Allen, avec qui Amazon avait signé un accord pour la production de quatre longs, étaient également distribués dans les salles par Lionsgate. Ce n’est qu’à partir de 2017, avec Wonder Wheel, qu’Amazon a changé de cap en se lançant exclusivement dans l’auto-distribution, exclusivement outre-Atlantique. À noter que suite à la résurgence des accusations pour abus sexuel contre Woody Allen, Amazon a mis fin à leur accord en refusant de sortir Un jour de pluie à New York ; en France, le film est distribué depuis le 18 septembre par Mars Films.
Quel impact attendre sur la chronologie des médias ? Variety indiquait qu’Apple serait en contact avec la NATO, la fédération des exploitants américains, pour définir leur durée d’exploitation. Une source anonyme citée par le magazine résume ainsi a position d’Apple : « Nous ne voulons pas être Netflix. »
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