Dimanche 10 mars à Los Angeles, le film de Justine Triet a atteint un point d’orgue avec l’Oscar du meilleur scénario original, au terme d’une pléiade de récompenses et de succès de fréquentation à travers le monde entier. Retour sur une ascension sans frontières.
Et pourtant, il n’était pas joué d’avance que cette Anatomie parvienne à séduire des millions de cinéphiles hors de nos frontières, la fréquentation des salles, bien que constamment en hausse, n’ayant pas renoué avec le niveau d’avant pandémie sur l’ensemble des marchés étrangers. Andrea Sponchiado, responsable du service Études d’Unifrance, a donc de quoi être comblé par le parcours du film, « auquel la Palme d’or a donné une visibilité impressionnante ». Quelques jours à peine après sa consécration cannoise, il est vendu sur tous les territoires, et sur tous les continents. Et « dès ses premières sorties, dans la foulée de son triomphe en France, il marche. »
À l’heure actuelle, Anatomie d’une chute a déjà été exploité dans 60 pays – et le sera encore dans une dizaine d’autres, dont la Chine à partir du 29 mars –, en multipliant les exploits : plus de 200 000 entrées au Brésil et autant au Mexique où il sort quelques jours après ses nominations aux Oscars, une récente première semaine à 100 000 spectateurs le classant 3e au box-office polonais, et, dans l’ensemble, une place dans pas moins d’une vingtaine de top 10 locaux, « notamment durant 6 semaines en Espagne », précise le spécialiste chiffres de l’organisme de promotion du cinéma français à l’international.
Actuellement, le film de Justine Triet cumule ainsi plus de 3,5 millions d’entrées à travers le monde, soit le double de sa performance en France, et est devenu la production française majoritaire (hors animation*) la plus vue en dehors de nos frontières depuis la crise sanitaire. « Pour trouver des chiffres supérieurs, il nous faut remonter à 2019 avec Qu’est-ce qu’on a encore fait au Bon Dieu ? et Anna de Luc Besson », note Andrea Sponchiado, en soulignant qu’Anatomie a rassemblé plus de spectateurs que des valeurs françaises comme Astérix et Obélix : L’Empire du Milieu ou Les Trois Mousquetaires, et qu’il est proche de doubler une autre Palme à la carrière internationale en or : Sans filtre de Ruben Öslund.
Carrière US
Porté par Neon** aux États-Unis, Anatomie d’une chute y a bénéficié d’une campagne soutenue et d’une exploitation continue depuis sa sortie mi-octobre 2023. Le distributeur américain spécialisé – déjà à l’œuvre, entre autres, sur Parasite qu’il a mené jusqu’à ses quatres Oscars dont du meilleur film en 2020 – « savait qu’il tenait un film fort » et a savamment « préparé le terrain ». À commencer par la stratégie de la sortie limitée, comme d’usage pour les films d’auteur, a fortiori étrangers ; soit « une première combinaison ultra restreinte de 5 copies, dans les principaux bastions cinéphiles de New York et Los Angeles ». Ce qui permet de générer une impressionnante moyenne par copie (dans le cas échéant, de 11 735 $), et de créer le buzz avant un élargissement de la combinaison les semaines suivantes.
Anatomie d’une chute était ainsi présent dans 440 salles américaines début novembre, puis a bénéficié d’un nouveau regain de visibilité sur 280 copies à la suite de ses cinq nominations aux Oscars. À la veille de la cérémonie du dimanche soir, sa diffusion avait atteint un nouveau pic de 450 salles, de quoi lui faire dépasser le cap des 5 M$ au box-office américain, équivalant à environ 460 000 entrées. À voir quelle sera la portée du nouveau souffle donné par son Oscar. Ce qui est sûr, c’est qu’il a déjà prouvé l’essentiel : « la capacité des spectateurs du monde entier – comme le démontrent aussi les succès de Perfect Days de Wim Wenders et de La Zone d’intérêt de Jonathan Glazer – à aller voir des films exigeants en salles », conclut Andrea Sponchiado.
* En comptant les animations, Miracoulous reste la première coproduction majoritaire française en termes d’entrées à l’international depuis la crise sanitaire
** Le distributeur américain a aussi sorti les 3 précédentes Palme d’or aux États-Unis, à savoir Sans filtre de Ruben Östlund, Titane de Julia Ducournau et, bien entendu, Parasite de Bong Joon-ho, Oscar du meilleur film, réalisateur, scénario original et meilleur film international en 2020.
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